<

retour


BLOG  et  TEXTES DIVERS

page 1 (vous êtes ici)
page 2

On peut faire mieux !
Prière
Apparition

I COMME ICARE
Photographie ancienne

La faïence de Quimper...
Le jeu des deux questions
Foot-ball, France-Ukraine 2013
Le discours du père de la mariée
Prière du poisson
OULIPO : Don du message
OULIPO : deux avatars de Nerval
OULIPO : signature mathématique des textes
OULIPO : Pelleteuses-tueuses (Chantal Robillard)
Faire-part de naissance
Coup dur pour un MoU
Le feu au cul
L’Albatros
L’inclination explique l’inclinaison
Madame Disdéri
Esprit
Sarkozy et le blé
Un peu de politique
La Halte des Caravaniers
Un départ à la retraite
Hommage à Yves Sévely
ONERA MAMMOUTH
Corbillard et neiges éternelles
Tromp
Automaticité et automatitude : une question de politique
Faux clone ou vrai clown ?
Le rouge et le vert
Devinette : qui suis-je ?
Guignoleries
Le Renard et le Corbeau
Plan de table
Pygmalion contrarié
Marianne et Madelon
Valls et Dieudonné
M. Hollande, I presume ?
Adieu Charlie, bonjour les charlots !
Entropie et filles de Loth
Mark Rothko

Marche avec Giacometti
Réponse aux bons vœux d’un anarchiste
Un excellen
t placement

Composition constructiviste
OULIPO : Fondu au noir
OULIPO : Quenelle à Queneau
Le Coronavirus
       - Gabrielle me trompe avec...
       - Petite histoire des pandémies
       - Le Con d’Irène
OULIPO :Nerval, acrostiche et Ascension  
OULIPO : Crêpes exquises
Adieu funèbre
Algues bretonnes et calligraphie chinoise

OULIPO : Amants exquis

Parfums exquis

Charades bretonnes
La France, mère des arts au pied du mur
OULIPO : Pangrammes du juge blond qui fume
OULIPO : Pangrammes de Werther

Grève à la SNCF
Contrôle Automatique et écologie
La colère d’Anton Kivi
Hommage à Alain et Véronique Born
Faust
Hommage à madame Quiviger
Ma dénonciation de eBay
Le visage interdit de la servante au grand cœur
Figure de proue
Statue Hemba
Photo de famille : cherchez l’erreur !
Réveil dans les limbes
Le Priape de Meneham
Salomé, Alice et Lolita
L’odalisque aux yeux d’or
à propos de l’affaire Roman Polanski
Intertextualité et sexualité
Pierrot Lunaire, Arnold Schönberg
Simple galet ou divine œuvre d’art ?
L’origine du monde
Hommage à Jean-Yves Povy
La faille d’un système
Ministres en cuisine
Tchernobyl et Fukushima
Le retour du croisé, par Hilare Poilaunet
Anne Sinclair
Anne Sinclair alias Marguerite de la nuit
Mécanique céleste
Le golf date de plusieurs millions d’années
Un paradoxe golfique
Discourtoisie golfique
Le Grand Inquisiteur : version de concert
Ave Maria !
Hommage à Jean-Marc Peyrard
Le Neptune de Kerfissien
Byblos : retour d’expérience
Santez Anna - Annapurna
Un socialisme précurseur
Le mariage du Figaro
Anniversaire du golf de Carantec
La Jeune Parque
Théorie du genre et sexe des anges
Désinvitation
Billy the Kid
Debout les morts !
Le roi des containers
Hommage à Alexandre Grothendieck
" Gabrielle me trompe avec...
Art, symétrie et dissymétrie
Concert au Petit Mazéré
Journal d’un confiné :
         - auto-portrait
         - Plage interdite : cherchez l’intrus
         - gériatrie
         - confinement et alcoolisme
         - cercle de confinement : les deux gendarmes
         - Jour de fête et amende neutre
         - Déconfinement et re-confinement
Scarlett O’Hara
Sculpture inclusive
Douceur chinoise
Hommage à Notre-Dame de Callot

 



ON PEUT FAIRE MIEUX !



Trouver POURHIET en 8 lettres était facile, mais il a surtout fallu faire vite pour aller chercher l’appareil photo à l’autre bout de la maison !
retour                                     haut de page

 


v

PRIÈRE

(extrait de Cueille la Nuit )


Samedi 21 octobre 1989



        Tous les samedis depuis quinze ans, très tôt et après avoir terminé mes rondes du marché aux puces autour de la basilique Saint-Sernin, je vais sur le boulevard voisin acheter les fruits et légumes de la semaine. Voilà un plaisir que je ne laisserais à personne !

        Depuis le temps que je me promène ici aux dernières heures de la nuit ou aux premières clartés du jour, observant les restaurateurs faire leur propre marché, je suis devenu connaisseur moi aussi. J’ai appris à distinguer les meilleurs produits, découvrant qu’ils ne sont pas toujours les plus beaux à regarder, et de ces connaissances je tire une fierté d’initié. Je n’ai aucune fidélité envers un quelconque marchand, seule la qualité m’attire.

        Hormis quelques exceptions obligées, je n’achète que ce qui pousse sous mon ciel, les saisons dont je respecte l’ordre étant celles de la région où je vis. Les produits importés ou artificiellement mûris, qui anticipent sur le cycle de la nature et qui en violent le rythme sacré, ne m’intéressent pas. Au vu de l’évolution des étalages, d’une semaine à la suivante, j’ai toujours eu plaisir à observer la ronde des saisons, et ma vie est ainsi ponctuée de ces naissances continuelles que j’attends comme preuve que la terre respire ; sur cette ondulation alors se synchronise le souffle de mon esprit, comptable ainsi du temps que la Parque nous laisse.

        Rentré à l’appartement, je déverse sur la table de la cuisine le contenu de mon caddie, une rivière de fraîcheur qui va maintenant abreuver la vie et le plaisir de mes filles. Parfois — ô le merveilleux moment ! — je reste auprès d’elles durant leur petit déjeuner, désignant la beauté de tel fruit comme l’achèvement d’un calcul divin et parfait. Les enfants m’écoutent, et par le facile et réel bonheur que je leur transmets alors, elles participent à mon désir de rythmer notre unique et même vie à la redécouverte annuelle de ces dons célestes :

        — Papa, me disent-elles en ce nouvel automne, les noix fraîches sont un peu plus amères que l’an passé, mais le goût du raisin muscat est merveilleux ; les cèpes, fermes et presque sucrés, ne pourraient être meilleurs. Papa, tu as fait là de bons achats.

        C’est surtout pour Clémence que mon marché respecte religieusement le cycle paternel et rassurant du ciel. Car la vie de la Terre est fille du mouvement universel, et c’est à cette énergie-là — ainsi donc qu’à l’harmonie parfaite et à la pure beauté des choses — que je désire alimenter mon enfant malade et qui probablement va mourir. Plus que de nécessités terrestres, et autour du symbole que porte la répétition des saisons, c’est à l’éternité du monde que je veux la nourrir, et aussi à l’espérance qui naît lorsque cette infinité se projette en immortalité au-delà de notre humaine et stérile raison.

        Oui ma chérie, mange, je te regarde. Et que le message de toutes ces offrandes admirables dont j’inonde ta chair qui meurt s’infiltre, telle une prière, dans la mystérieuse sève de ton autre vie qui monte…

        … Et puisse ton âme alors, vibrer à l’amour — ainsi éternel — de ton père !

retour                                         haut de page

 

 

APPARITION


(cliquer sur l’image)
retour                                         haut de page

 

 

I   COMME  ICARE

ICOMICAR


(Cliquez sur l’image)
retour                                       haut de page

 

 

PHOTOGRAPHIE ANCIENNE

La naissance de la Photographie

article paru dans La Dépêche du Midi
en janvier 1978 à l’occasion de l’exposition
Toulouse 1855, calotypes de la Collection Le Pourhiet
à la galerie Jean Dieuzaide

Analyse d’un auto-portrait daguerrien

(article paru dans la revue Photographies,
n°4, avril 1984)

La magie du daguerréotype
autour de l’Hérodiade de Stéphane Mallarmé

extrait du roman Cantique

Autour d’une malle de laboratoire photographique
pour le procédé au papier ciré (calotypie, 1850)



Biographie de l’opticien-inventeur
Charles Chevalier


retour                                                             haut de page

 

 

La faïence de Quimper

dans les courants artistiques de la période 1880-1940

(Cliquez sur l’image)
retour                                                             haut de page

 

 

retour

Le jeu des deux questions

 

Ce jeu, ainsi que des centaines de réponses, est proposé à tous sur le site internet de Nicolas_Graner. À la demande du joueur, l’ordinateur tire deux questions au hasard dans une banque existante ; il faut leur trouver une réponse unique, avec "créativité et astuce". Exemples :

  • Q1 : première question
  • Q2 : deuxième question
  •  R  : réponse unique

---------------------------------------------------------------------------------------------

Q1 - Qui estampe les Japonaises ?
Q2 - Comment ça va ?
  R - Shavaku Shikusha.

Q1 - Qui attend la Sainte-Touche ?
Q2 - Qu’y a-t-il de plus troublant qu’un trou noir ?
  R - Un trou rose..

Q1 - Que révèle une photo ?
Q2 - Dans mille ans, on se souviendra de quoi ?
  R - Quelques sujets de fixation.

Q1 -  Quel est votre air préféré ?
Q2 -  Qui mange des religieuses ?
  R -  Les mousquetaires au couvent.

Q1 - En quoi Marseille et le PSG se ressemblent-ils ?
Q2 - Que coupe-t-on avant de battre ?
  R - Le blé.

Q1 - La semaine prochaine j’enlève quoi ?
Q2 - Comment fait-on un clafoutis aux griottes ?
  R - Les noyaux, enlève les noyaux.

Q1 - Où veux-tu que je te pince ?
Q2 -
À voile ou à vapeur ?
  R -
Entre les deux.

Q1 - Quel rapport y a-t-il entre un demi et un tiers ?
Q2 - Quel est votre meilleur souvenir ?
  R - Un plaisir interdit.

Q1 - Qu’y a-t-il dans ton dos ?
Q2 - Travailler plus pour gagner moins... Qui a eu cette charmante idée ?
  R - Mon patron. Je me fais avoir profond.

Q1 - Qui est le père de vos enfants ?
Q2 -
Pourquoi faites-vous l’autruche ?
  R -
Il y a des réalités que je préfère ignorer.

Q1 - À partir de quand devient-on vieux ?
Q2 - Qui a peur de Virginia Woolf ?
  R - On est jeune tant qu’on a peur du wolf et on devient vieux dès qu’on a peur de Virginia.


Q1 - Pour qui sonne le glas ?
Q2 - Qui a mangé le dernier cannibale ?
  R - Hélas ! le dernier cannibale n’est plus, il vient de se manger lui-même.

Q1 - Qui est trop au lit pour être au Net ?
Q2 -
Comment vas-tu, Yau de Poêle ?
  R -
Étoile à matelas !

Q1 - Qu’avez-vous tué à la chasse ?
Q2 -
Pourquoi n’avez-vous pas tiré ?
  R -
A la chasse je ne tire jamais car je n’y vais que pour tuer le temps. (Note qui n’a rien à voir : aux toilettes, en revanche, je prends mon temps puis tire la chasse.)

Q1 - Comment démonter le concile de Trente avec une clé de douze ?
Q2 - Comment doubler Hélène de Troie ?
  R - J’avise mon comptable.

Q1 - Le double-six entame quelle partie ?
Q2 -
Où commence la mauvaise foi ?
  R -
Dos-minette vobis cum.

Q1 - Qui suis-je, d’où viens-je, où vais-je ?
Q2 - Pourquoi pas moi ?
  R - Vous aussi ! Bienvenue au club, M. Alzheimer !

Q1 - Tout reposait dans Ur et dans quoi, déjà ?
Q2 -
La soupe à la grimace fait grimacer qui ?
  R -
Jéri... Lewis ?

Q1 - Qu’est-ce que la culture ?
Q2 - Qui porte le petit pot de beurre ?
  R - C’est Jack Lang.

Q1 - Comment combattre la dictature ?
Q2 - Qu’est-ce qu’on a maintenant pour cent balles ?
  R - Tuons cent dictateurs, et on verra si pour cent balles on peut se payer la démocratie.

Q1 - Du marteau et de l’enclume, qui a raison ?
Q2 - Comment réussir à échouer ?
  R - Prends la place d’une enclume, tu auras vite ta réponse.

Q1 - Où les beaux esprits se rencontrent-ils ?
Q2 - Quel est le plus long chemin entre deux points ?
  R - Ce jeu, dans la recherche incessante d’un lien toujours plus spirituel entre deux points d’interrogation, apporte intrinsèquement une réponse à la question qu’il pose ici.

Q1 - Pourquoi la règle aime le compas ?
Q2 - Sans blague, pourquoi diable voulez-vous épouser ma niaise de sœur ?
  R - Son piquant savoir-faire, son bel écart de jambes et ses figures rayonnantes suffisent à un dessein rationnel.

Q1 - Qui décide pour vous ?
Q2 - Quel fantôme dort aussi dans vos draps ?
  R - C’est Maman, mais mon psy me soigne pour ça.

Q1 - Pourquoi mange-t-on ?
Q2 - Dans quels bras souhaiteriez-vous dormir ?
  R - Qui dort dîne, ou être morfale pour mériter Morphée.

Q1 - Qui l’eût cru ?
Q2 - Alors, raconte, comment ça s’est passé ?
  R - Si j’avais annoncé que c’était du tout cuit, personne ne l’eût cru. Et pourtant c’est bien ainsi que ça s’est passé puisque personne ne l’eut cru.

Q1 - Qui l’eût cru ?
Q2 - Pourquoi manger cet enfant tout cru ?
  R - La faim de l’ogre était telle qu’il a mangé l’enfant tout cru. Qui l’eût cru, à part celui-là même qui l’eut cru ? Personne, sauf peut-être ceux qui pensaient que ce scénario récurrent était du tout-cuit pour l’ogre.

Q1 - Qui est-ce ?
Q2 - Qui met la sirène ?
  R - Quies. Il teste ses boules à la manière d’Ulysse.

Q1 - Aimez-vous Brahms ?
Q2 - Comment sortir de la machine à broyer ?
  R - Par morceaux.

Q1 - Que faites-vous au pied du mur ?
Q2 - À combien estimez-vous le prix de la vie ?
  R - J’attends de savoir de combien de balles je vais mourir.

Q1 - Où voir l’origine de mes perversités amoureuses ?
Q2 - C’est qui l’Abbé des Anges ?
  R - L’aumônier de l’orphelinat.

Q1 - L’appétit vient en mangeant quoi ?
Q2 - Comment avaler tout ce plat ?
  R - Commence par les amuse-bouche, le reste suivra plus facilement.

Q1 - Dans un monde de cyclistes, qui freine ?
Q2 - Qu’est-ce qui descend du singe ?
  R - La queue.

Q1 - En avons-nous encore ?
Q2 - Qu’est-ce que le monde si ce n’est cette chose que nous portons dans le cœur?
  R - Je ne puis répondre sans savoir de quelle chose il s’agit.

Q1 - Quel temps fera-t-il hier ?
Q2 - Où serez-vous demain ?
 R - Demain je serai dans le futur d’aujourd’hui et j’utiliserai le passé pour décrire le temps d’un hier qui est l’actuel présent.

Q1 - Que veut dire avoir du sexe à piles ?
Q2 - Quelle sorte de fille es-tu ?
  R - C’est très simple : tu choisis le voltage, moi je m’occupe du compteur.

Q1 - Quelle exception confirme la règle ?
Q2 -
Qui fait des propositions à ses subordonnées ?
  R -
La Principale du couvent.

Q1 - Pourquoi Ulysse est-il la splendide agonie d’un genre ?
Q2 - Quelle est la réponse à l’énigme classique du Sphinx ?
  R - Θέλεις να σου απαντήσω στα ελληνικά.

Q1 - Qui roulera sa brouette ?
Q2 - Quelle est la réponse à l’énigme classique du Sphinx ?
  R - Priape, c’est mon nain de jardin ! Celui-là roule sa brouette pour transporter sa cinquième jambe du matin, sa troisième de midi, et sa quatrième du soir.

Q1 - Si je vous dis qui, vous répondez quoi ?
Q2 -
Qui commence à radoter ?
  R -
Tu parles trop, on sait déjà que c’est toi.

Q1 - Que faire en un gîte à moins que l’on ne songe ?
Q2 -
Qui prêche encore dans le désert ?
  R -
Un solitaire.

Q1 - Comment gagnez-vous votre vie ?
Q2 - Et Dieu, dans tout ça ?
  R - Notre quête de Dieu passe d’abord par celle des enfants de chœur à l’église. La perte d’une pièce de monnaie vaut bien le gain, fût-il improbable, de la vie éternelle.

Q1 - Quand faut-il partir à point ?
Q2 - Attention, j’entends quelqu’un qui arrive ! Qu’est-ce que tu vas faire ?
  R - Si ton mari me trouve ici, je suis cramé. Mieux vaut partir à point . A demain chérie !

Q1 - Qu’auras-tu comme alibi à l’heure du crime ?
Q2 - Attention, j’entends quelqu’un qui arrive ! Qu’est-ce que tu vas faire ?
  R - Je décide finalement de ne pas commettre ce crime auquel tu me pousses. Tue toi-même ton mari, moi je me barre, adieu.

Q1 - Miroir, quelle est la plus belle femme du Monde ?
Q2 - D’où vient la mauvaise haleine ?
  R - Je crains que ma réponse ne vous indispose.

Q1 - Quel est le plus beau mot de la langue française ?
Q2 - Comment aimez-vous le pudding à la mayonnaise ?
  R - Scatophile et scatophage, j’aime la merde plus que tout, celle qu’on me dit et celle qu’on me sert.

Q1 - Qui chante encore la Marseillaise ?
Q2 - Quel capitaine fait couler beaucoup d’ancres ?
  R - Nemo

Q1 - Quand avez-vous ri pour la dernière fois ?
Q2 - Vous espérez quoi, à la fin ?
  R - Votre question arrive un peu tard car je suis déjà mort, mais mort de rire. J’avais toujours espéré rire enfin, et me voici donc comblé.

Q1 - Pour un élu, il faut combien d’appelés ?
Q2 - À la bonne franquette, c’est chez qui ?
  R - Franquette, c’est ainsi qu’on l’appelle la nana de notre pote Francky. Depuis belle lurette il n’y a plus de privilégiés pour elle. Chacun de nous est appelé dans son lit et chacun y est son élu. Plus que bonne, Franquette est une sainte, tout le monde l’aime, c’est notre petite femme à tous. Heureusement que Francky s’en fout, car il n’a pas le choix.

Q1 - Quel est le rapport entre le facteur rhésus et le facteur Cheval ?
Q2 -
Comment atteindre le septième ciel ?
  R -
Je te recommande le plus bourrin de nos deux facteurs, un étalon sans rapport avec l’autre latiniste exsangue. Crois-moi, avec celui-là, à l’heure du courrier, c’est Pégase qui arrive chez toi et qui t’expédie au ciel en Chronopost.

Q1 - Quel est le rapport entre le facteur rhésus et le facteur Cheval ?
Q2 - Pourquoi faut-il le faire ?
  R - Quand deux facteurs sont réunis, il faut faire simplement leur produit et ne pas s’inquiéter de leur rapport. Car en appliquant la théorie du genre à la lettre, on marie ainsi le latiniste distingué et le bourrin rustique, loin de toute morale désuète et de hiérarchie réactionnaire. Oui, voici naître une nouvelle et grande algèbre, moderne et socialiste.

Q1 - Que fera ta sœur quand elle aura fini de battre le beurre ?
Q2 - Si je vous dis "X", vous pensez à quoi ?
  R - Une branlette hard au polytechnicien inconnu.

Q1 - Qu’élève-t-on aux hormones ?
Q2 - Si je vous dis « X », vous pensez à quoi ?
  R - Le sexe des polytechniciens.

Q1 - Si je vous dis « X », vous pensez à quoi ?
Q2 - Quand l’homme a découvert que la vache donnait du lait, que faisait-il exactement ?
  R - Une chose que la morale réprouve et que le religion condamne.

Q1 - Si je vous dis « X », vous pensez à quoi ?
Q2 - Qu’ajouter au sabre et au goupillon ?
  R - Ne soyons pas hypocrites, tout le monde pense à la même chose.

Loi de la nature et théorie du genre

Q1 - Quelle est la loi de la Nature ?
Q2 - Pourquoi Ma cache Bonnot ?
  R - Bonnot baise F.

Q1 - Quelle est la loi de la Nature ?
Q2 - Au début était quoi ?
  R - Adam + Eve.

Q1 - Quelle est la loi de la Nature ?
Q2 - Qui est-ce qui fait quoi ?
  R - Papa fait le papa et Maman fait la maman.

Q1 - Dans quel trou mettre la cheville ?
Q2 -
Pourquoi confond-on les nippons avec la Chine ?
  R -
Cette question est parfaitement significative du délabrement de notre sexualité.

Q1 - Pourquoi confond-on les nippons avec la Chine ?
Q2 - Qui est à l’appareil ?
  R - L’inspecteur de nos académies est au téléphone, il confirme officiellement aux enseignants qu’il n’y a plus de différence entre les sexes.

Q1 - Si votre mère n’est pas votre mère, qui est-elle ?
Q2 - Où demeure-t-il ?
  R - Je suppose que tu parles de mon père. Il habite à la maison avec la personne que je croyais être ma mère, mais avec la nouvelle théorie du genre, je ne sais plus qui est l’un ni qui est l’autre, ce qui est normal car eux-mêmes ne le savent pas non plus.

Q1 - Si votre mère n’est pas votre mère, qui est-elle ?
Q2 - Comment savoir si un anneau intègre a un idéal distingué ?
  R - Ma mère est mon père (ou l’inverse), voilà. Derrière votre question, je vous entends penser sournoisement que son anneau a forcément perdu en intégrité ce qu’il a gagné en souplesse. Mais non, car la toute nouvelle théorie du genre permet aujourd’hui d’affirmer que tout anneau républicain est non seulement intègre légalement et moralement mais flanqué aussi d’un idéal social distingué autant que distinctif. Alors pas de question insidieuse, merci.

Q1 - Où chasser son ennui ?
Q2 - Si votre mère n’est pas votre mère, qui est-elle ?
  R - Ta question révèle un problème existentiel. Mais la théorie du genre est là pour te guérir. Vis donc avec ton époque, nique ton père !

Q1 - C’était comment à l’époque ?
Q2 - Pourquoi tirer la bobinette ?
  R - A l’époque on tirait la Bobinette parce que c’était la loi de la nature. Mais maintenant, avec la nouvelle théorie du genre qui vient d’être inventée, c’est plutôt le gars Bobby qu’il faut tirer.

Q1 - Pourquoi faut-il le faire ?
Q2 - Quel est le rapport entre le facteur rhésus et le facteur Cheval ?
  R - Quand deux facteurs sont réunis, il faut faire simplement leur produit et ne pas s’inquiéter de leur rapport. Car en appliquant la théorie du genre à la lettre, on marie ainsi le latiniste distingué et le bourrin rustique, loin de toute morale désuète et de hiérarchie réactionnaire. Oui, voici naître une nouvelle et grande algèbre, moderne et socialiste.


Q1 - Qu’est-ce que le génie ?
Q2 - Quel est le contraire de rien du tout ?
  R - C’est tout dans un rien.

Q1 - Qu’est-ce que le génie ?
Q2 -
Qui amuse la Galerie des glaces ?
  R -
Une lumière qui fait de l’ombre à toutes les autres.


Q1 -  To be or not to be ?
Q2 -  Qu’est-ce qu’il y a à la télé ce soir ?
  R -  On revient toujours à cette question, mais il n’y a jamais rien à répondre.

Q1 - To be or not to be ?
Q2 -
Qui ira chercher le vétérinaire ?
  R -
No toubib, that closes the question.


Q1 - Quoi, ma gueule, qu’est-ce qu’elle a ma gueule ?
Q2 - Pourquoi la foudre vous ignore-t-elle ?
   R - Il y a des gueules qui ne provoquent pas les coups de foudre.

Q1 - Pourquoi la foudre vous ignore-t-elle ?
Q2 - Qui s’honore en faisant du bruit ?
  R - Je m’honore d’être un pétomane dont la foudre craint et fuit le tonnerre.

Q1 - Quoi, ma gueule, qu’est-ce qu’elle a ma gueule ?
Q2 -
Comment peuvent-ils tenir sur l’orbite ?
  R -
La force centripète garantit la bonne tenue de l’orbite, c’est connu ; mais en revanche elle déforme la face des constipés


Q1 - Quel est le b.a.-ba du X ?
Q2 -
Qui m’expliquera l’atome crochu ?
  R -
C’est le crochet élémentaire.

Q1 - Quel est le b.a.-ba du X ?
Q2 -
Qu’est-ce qu’on fait ce soir ?
  R -
Une minette basique.

Q1 - Quel est le b.a.-ba du X ?
Q2 - Comment s’appelle le chat de ton frère ?
  R -
Au lieu de tergiverser, file donc caresser la chatte de ma sœur...

Q1 - Quel est le b.a.-ba du X ?
Q2 -
L’Amour est enfant de Bohême, mais Bohême est enfant de qui ?
  R -
Un nouveau-né peut être abandonné par sa mère aux services de l’Etat, c’est la naissance dite "sous X". L’article qui définit cette possibilité est appelé lui-même article "X" par les juristes ; il porte le numéro 227-1 dans le code pénal. Même si ledit "X" est complexe, son b.a.-ba est néanmoins très clair. Il stipule qu’un bébé né ainsi doit ensuite demeurer anonyme aux yeux de la Société. Ainsi, à titre d’exemple et pour aller au bout de votre question, on ne saura jamais de qui le beau M. est l’enfant.


Q1 - Et Dieu, dans tout ça ?
Q2 -
Celui qui a les boules, qui est-ce ?
  R -
C’est le Grand Régulateur.

Q1 - Et Dieu, dans tout ça ?
Q2 -
En quoi vous êtes vous trompé le plus ?
  R -
C’est la règle de trois.


Q1 - Est-ce toi, Marguerite, est-ce toi ?
Q2 -
Mœbius ou Bonnot ?
  R -
Non, c’est Fernande.

Q1 - Est-ce toi, Marguerite, est-ce toi ?
Q2 - Pourquoi y a-t-il des éclipses ?
  R - Un coup tu me vois, un coup tu ne me vois plus ! Tout est normal, mon chéri : c’est le septième ciel !


Q1 - Qu’est-ce qui vous fait rire ?
Q2 -
Comment répondre en deux mots ?
  R -
Pas Bergson !

Q1 - Qu’est-ce qui vous fait rire ?
Q2 -
Votre réponse comporte combien de mots ?
  R -
Voir ma réponse précédente.


Q1 - Excusez-moi, où sont les toilettes s’il vous plaît ?
Q2 -
Côté jardin ou côté cour ?
  R -
Faites derrière la haie.

Q1 - Excusez-moi, où sont les toilettes s’il vous plaît ?
Q2 - Qui porte une mitre fendue au bout ?
  R - Chi vous cherchez l’évêché, ch’est là-bas


Q1 - Pourquoi cette vache rit ?
Q2 - Devine qui vient dîner ce soir !
  R - La Castafiore ! Elle rit toujours de se trouver belle en son miroir, on n’y peut rien. Ce soir tu éviteras de la placer à table en face de la grande glace, car sinon elle ne fera que rigoler toute seule et elle nous pourrira le dîner.

Q1 - Quand avez-vous ri pour la dernière fois ?
Q2 - Qu’est-ce que la belle époque ?
  R - C’était avant que je ne brise mon miroir.
(Réponse de la Castafiore )



Q1 - Pourquoi m’as-tu abandonné ?
Q2 -
Qui habite chez vous ?
  R -
Mon mari est revenu.

Q1 - Raconte-moi quelque chose de vraiment, vraiment triste.
Q2 - Qu’est-ce qui vous fait pleurer ?
  R -
Ma femme est revenue.


Q1 - Comment s’orienter en Orient ?
Q2 -
Qui a choisi vos amis ?
  R -
C’est le Grand Maître qui décide.

Q1 - Comment s’orienter en Orient ?
Q2 - Comment savoir ?
  R - Il faut être initié.


Q1 -  Qui a faim de haricots ?
Q2 -  
Qui berce les palmes par dessus les toits ?
  R -  
Le pétomane.

Q1 - Qui a faim de haricots ?
Q2 - Pourquoi n’y a-t-il plus de papier toilette ?
  R - C’est le pétomane : il a fait main basse sur le stock.

Q1 - Pourquoi la foudre vous ignore-t-elle ?
Q2 - Qui s’honore en faisant du bruit ?
  R - Je m’honore d’être un pétomane dont la foudre craint et fuit le tonnerre.


Q1 - Qui est votre héros préféré ?
Q2 -
Qu’est-ce qui vous fait pleurer ?
  R -
Le saigneur des oignons.

Q1 - Qui est votre héros préféré ?
Q2 -
Qui était petit, quand vous étiez petit ?
  R -
Jésus.


Q1 - Qui occupe le devant de la scène ?
Q2 - D’où vient la mauvaise haleine ?
  R - Le souffleur.

Q1 - Qui occupe le devant de la scène ?
Q2 - 
Qu’ouvre la clé de sol ?
  R -
La gorge de la diva.

Q1 - Qu’ouvre la clé de sol ?
Q2 -
Qui coupe le souffle ?
  R -
La porte du tombeau.


Q1 - Vers quelle limite tend l’élastique ?
Q2 -
Par quoi finir l’introduction ?
   R -
Un rappel du sujet.

Q1 - Vers quelle limite tend l’élastique ?
Q2 - Jusqu’où peut aller l’amour du prochain ?
  R - La rupture.

Q1 - Jusqu’où peut aller l’amour du prochain ?
Q2 - Qu’est-ce qui peut être à la fois aigu et grave ?
  R - La chaude-pisse.


Q1 - L’ordre alphabétique révulse qui ?
Q2 -
 Qui entend la raison du plus faible ?
  R -  
Zorro.

Q1 - L’ordre alphabétique révulse qui ?
Q2 -  
Pour couper court, comment fait-on ?
  R -  
Demande aux zeunuques.


Q1 - Qui gravit encore la roche de Solutré ?
Q2 -
Qui suis-je, d’où viens-je, où vais-je ?
   R -
Un fantôme sur un sentier que le temps efface.

Q1 - Qui gravit encore la roche de Solutré ?
Q2 - De quoi les jalousies nous protègent-elles ?
  R - Des curieux.


Q1 - Quand on saute une ligne, que devient cette ligne ?
Q2 -
Qui décide pour vous ?
  R -
Maman, parfois.

Q1 - Quand on saute une ligne, que devient cette ligne ?
Q2 -
Comment calculez-vous la TVA ?
  R -
Grosso modo.

Q1 - Quand on saute une ligne, que devient cette ligne ?
Q2 - Si je vous dis « X », vous pensez à quoi ?
  R - Une inconnue.


Q1 - 23 fois 3 ça fait quoi ?
Q2 -  
Pourquoi oubliez-vous toujours votre mot de passe ?
  R -  
Les chiffres, ça me met la tête à l’envers.

Q1 - 
23 fois 3 ça fait quoi ?
Q2 -  
Quand est-ce que les réponses précèdent les questions ?
  R -  
Ça se mord la queue, tout ça.


Q1 - Où commence la petite vertu ?
Q2 - Où découvrir un trésor ?
  R - Sous ta jupette, ma chérie.

Q1 - Où commence la petite vertu ?
Q2 -
Où apprend-on à enfoncer les portes ouvertes ?
  R -
Dans la chambre de Monsieur.


Q1 - Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été avait, en s’en allant, négligemment jeté cette faucille d’or dans le champ des étoiles ?
Q2 - À quelle heure ouvrent ces jolies jambes ?
 Réponse de Ruth - Je ne sais pas quand Booz va se réveiller. En attendant je regarde le ciel et je me pose la même question que toi.

Q1 - Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été avait, en s’en allant, négligemment jeté cette faucille d’or dans le champ des étoiles ?
Q2 - Quelle est la bonne résolution ?
 Réponse de Ruth - Ras-le-bol de regarder le ciel. Je réveille Booz.


Q1 - Pourquoi faut-il éteindre le plafonnier ?
Q2 -
Où puis-je cacher ce sein que vous ne voulez voir ?
  R -
Eteins et enlève tout, la morale s’accommode de l’obscurité.

Q1 - Pourquoi faut-il éteindre le plafonnier ?
Q2 -
Quelle sorte de fille es-tu ?
  R -
Éteins, et tu sauras.


Q1 - Dans quel trou mettre la cheville ?
Q2 - Pourquoi les fourmis sont dans les jambes ?
  R - Plutôt que poser une question idiote, retire donc ta cheville de la fourmilière.

Q1 - Dans quel trou mettre la cheville ?
Q2 - Où voir l’origine de mes perversités amoureuses ?
  R - Hé ! Gros stupide ! Pour prendre ton pied, ce n’est pas ta cheville qu’il faut mettre dans le trou 

Q1 - Dans quel trou mettre la cheville ?
Q2 -
Pourquoi confond-on les nippons avec la Chine ?
  R -
Cette question est parfaitement significative du délabrement de notre sexualité.


Q1 - Comment peut-on parler pour ne rien dire ?
Q2 - Pourquoi faudrait-il toujours se la boucler ?
  R - Quand tu te tais tu n’en dis pas moins que quand tu parles. Boucle-la donc.

Q1 - Comment peut-on parler pour ne rien dire ?
Q2 - Pour un élu, il faut combien d’appelés ?
  R - Pose la question à ta femme.


Q1 - kilo, mega, giga, tera, peta, exa, zetta, yotta... et après ?
Q2 - 
Qu’est-ce qu’une femme honnête ?
   R -
 yapa...

Q1 - kilo, mega, giga, tera, peta, exa, zetta, yotta... et après ?
Q2 -
Pourquoi acheter français ?
  R -
fopa...

Q1 - kilo, mega, giga, tera, peta, exa, zetta, yotta... et après ?
Q2 -
Quand on est tout en haut, on voit quoi ?
  R - 
hima, laya...

Q2 - kilo, mega, giga, tera, peta, exa, zetta, yotta... et après ?
Q1 - Qu’est-ce que Newton a fait de sa pomme ?
  R - caca...


Ma sœur et le zouave

Q1 - Qui joue sur du velours ?
Q2 - Qu’en est-il de l’idylle du zouave et de ta sœur ?
  R - Ça y est, ma sœur a posé sa main sur la culotte du zouave.

Q1 - Qu’en est-il de l’idylle du zouave et de ta sœur ?
Q2 - 
Pour un élu, il faut combien d’appelés ?
  R - 
Finalement ma sœur s’occupe de tout le régiment.

Q1 - Si je vous dis « X », vous pensez à quoi ?
Q2 - 
Où t’habites ?
Réponse du zouave - 
Mets ta main dans ma culotte, tu sauras.

Q1 - Si j’étais vous, je serais qui ?
Q2 - L’ordre alphabétique révulse qui ?
  R - Un zouave.  (Note qui n’a rien à voir : Dites à votre sœur que j’ai une surprise pour elle dans ma culotte)

Q1 - Sans blague, pourquoi diable voulez-vous épouser ma niaise de sœur ?
Q2 -
Comment toi nommer ?
  R -
Moi être le zouave.

Q1 - Que fera ta sœur quand elle aura fini de battre le beurre ?
Q2 -
Qui craque pour une gitane ?
  R -
Tous les matins, après son entraînement à la baratte manuelle, ma sœur arrête de battre le Beur pour se taper le zouave. Voilà un changement de pignon d’autant plus audacieux que ce beau militaire serait également, dit-on, porté sur le pédalier. Afin de convertir cet indécis aux seuls avantages féminins, et pour mieux le faire craquer, ma sœur a choisi de se dégiser en bohémienne, et c’est donc d’une main exotique qu’elle ouvre la culotte du bonhomme. La nouvelle gitane, que ses exercices matinaux ont échauffée, empoigne alors — tel un guidon — le manche en fer et d’enfer qui se trouve là, puis elle le pompe en roue libre ; tandis que l’heureux élu, tout forbazouillé de ce qui lui arrive, diverge et entonne La Marseillaise, suivi en écho par le petit Beur qui fut tout à l’heure battu et qui se fourbit le goumi dans la pièce à côté d’où il regarde la scène par le trou de la serrure. Bientôt incandescente, notre Carmen allume alors une pipe qui met le feu dans la tête du zouave et qui embrase sa chéchia, voir l’image ci-dessous. Ma sœur fume cette pipe jusqu’au bouquet final attendu, sans mégoter, et tout cela sans braquet ni briquet mais seulement avec la science et le talent qu’on lui connaît. Il serait absurde de nier que ma sœur n’ait un petit vélo dans le cigare et un autre entre les jambes, mais il faut bien admettre prosaïquement qu’elle a surtout le feu au derrière, voir encore ci-dessous.



Bis repetita placent

Q1 - Dans combien de temps la reverrez-vous ?
Q2 - Pourquoi ne l’avez-vous pas lavé ?
  R - Je fais l’avé et n’irai plus jamais (oh !) la voir.
        Je fais laver et n’irai plus jamais au lavoir.

Q1 - Si les poules avaient des dents, que diraient les coqs ?
Q2 - Qui êtes-vous ?
  R - Aïe !
        I  
  ( = "moi" en anglais. Prononcer "Aïe")

Q1 - J’ai un projet à faire à l’école, c’est de créer un jeu de société différent de ceux qui existent déja. Avez-vous des idées à me proposer ?
Q2 -
Pouvez-vous décrire une balle de ping-pong vue de l’intérieur ?
   R -
Non, moi je ne m’intéresse qu’au racket.
         Non, moi je ne m’intéresse qu’aux raquettes.

Q1 - Quand on est tout en haut, on voit quoi ?
Q2 - Qu’élève-t-on aux hormones ?
  R - Les vaux.
       Les veaux.

Q1 - To be or not to be ?
Q2 - Combien de « o » y a-t-il dans oulipo ?
  R -  From beginning to end, you have to be funny and keep doing here oulipo puns.
           From beginning to end, you have two. Be funny and keep doing here oulipo puns.

Q1 - Que faire de cette parole, si d’argent elle est ?
Q2 - De quelle matière sont faits les rêves ?
  R - Tais-toi et dore.
        Tais-toi et dors.

Q1 - Tout reposait dans Ur et dans quoi, déjà ?
Q2 - Où se trouve le bout du monde ?
  R - Dans la fin de mon vers.
        Dans la fin de mon verre.

Q1 - On voit quoi quand on contemple son nombril ?
Q2 - Quel est ce jeu ?
  R - L’ego.
        Le go.


Réponses longues

Q1 - Quelle est la réponse ultime à la question de la Vie, l’Univers et le Reste ?
Q2 -
Où faut-il s’adresser  ?
  R -
Tu vas à la mairie, troisième étage, couloir de droite. Tout au bout, en face des toilettes, une porte s’ouvre sur un autre couloir aux murs vert sombre, un boyau encombré de vieux meubles en attente de déchetterie. À droite, juste après un tas de chaises, il y a un escalier que tu montes en faisant attention à certaines marches instables. Sur la gauche du palier où tu arrives, en face d’une photocopieuse ancienne qui ne sert plus que de support à une cafetière tout aussi désuète, tu entres sans frapper dans une pièce dont la porte est ornementée d’un poster de Marlon Brando dans le rôle de Jules César, on ne peut pas ne pas le voir, c’est magnifique. Il y a là deux bureaux et deux secrétaires qui se demandent depuis plusieurs années ce qu’elles ont fait pour mériter cette planque paradisiaque, et qui se demandent surtout, d’un air plus ahuri que seulement étonné, comment tu as pu, toi, arriver jusque là. Avant que tu ne les surprennes, l’une (celle dont le bureau est situé au dessous de la lucarne) lisait Camus en se refaisant des ongles mauves ; l’autre lisait Sartre tout en baillant et en rompant par téléphone avec son fiancé de la veille. Pose ta question à l’une des deux, n’importe laquelle, ou alors aux deux à la fois. À mon avis, beau mec comme tu es, tu as toutes les chances d’obtenir une réponse sympathique.

Q1 - Comment résoudre la quadrature du cercle ?
Q2 -
Qu’est-ce qu’une femme honnête ?
  R -
Voilà une question posée jadis par Archimède et Socrate et à laquelle personne n’avait su répondre jusqu’à présent. On sait également les vains efforts qui furent déployés par Bernouilli pour mieux comprendre, après l’autre Xanthippe, la nature irrationnelle de sa Lemniscate. Je propose ici une expérience nouvelle qui résout enfin le problème. Mettons en rond, tout nus au milieu de leur réfectoire, des militaires du Génie, de préférence des polytechniciens car on dit que ce sont les meilleurs ; et au centre de cette géométrie déshabillons une inconnue. Vous verrez que tous les officiers du cercle vont fuir en bande vers leur carré, et que ces brillants couillons auront donc réussi, non seulement à résoudre la quadrature du cercle, mais encore — ipso facto — à définir leurs épouses comme seules femmes honnêtes, au mépris de celle qui tentait naïvement de placer sa faim à leur mess.

Q1 - Comment se gratter la tête lorsqu’on l’a perdue ?
Q2 - Que pensez-vous du C.P.E. ?
  R - Tout le monde sait qu’il y a quelques années j’ai découvert le fameux Cytoplasmic Polyadenylation Element (CPE). Ce zoukbioroston à 4 branches est présent dans le cytoplasme et il permet l’ajout d’une queue poly-A en troisième phase d’un ARNm, voilà qui est désormais bien connu. Ma découverte fut en biologie la révolution que tout le monde attendait. Mais alors que la complexité de mes travaux me faisait parfois perdre la tête, et qu’il m’était donc impossible de me la gratter pour retrouver rapidement le fil de mes idées, je m’étais aperçu qu’en me grattant le cul à la place d’icelle, non seulement mes idées perdues revenaient en force mais encore qu’elles arrivaient avec de nouvelles intuitions qui constituaient un moteur nouveau à mes recherches. En fait c’est surtout à ma publication des vertus de ce grattage que je dois mon renom, et paradoxalement je n’ai pas reçu mon prix Nobel pour le CPE mais bien pour cette deuxième découverte dont la communauté scientifique internationale, après s’y être essayée, avait reconnu l’importance.

Q1 -  Si Martine est à la plage... qui s’occupe de la ferme ?
Q2 -  La semaine prochaine j’enlève quoi ?
  R - Chère amie, est-ce bien vous qui me posez cette délicieuse question ? Par ce beau temps votre fille est à la plage avec des camarades de son âge, et je sais que votre mari est parti au salon de l’agriculture. Vos employés font la sieste, les vaches ruminent tranquillement dans la prairie, un soleil de plomb tente d’infiltrer les ombres de vos poulaillers, de vos écuries, de vos porcheries... Vos lapins copulent avec ardeur. Belle indolente, attendez donc le retour de Martine, ce soir elle s’occupera de tout à la ferme ; et ne remettez pas à plus tard ce que vous pouvez faire tout de suite. Oui, enlevez-tout maintenant, je vous attends dans la grange.

Q1 - Pourquoi ma chatte se couche sur le clavier ?
Q2 -
Comment prendre son pied sans perdre la tête ?
  R -
Tu sais bien, exquise féline, que notre cunnilingus a toujours fait le délice de ma bouche et le délire de nos sens. Pourquoi alors me poser cette question inutile sinon absurde ? Dans l’abysse infernal où tu m’aspires, cher amour, il me faut certes garder le contrôle de ma tête, mais plus prosaïquement je perds néanmoins le dentier sur lequel ton animal glouton se couche !

Q1 -  Qu’avez-vous tué à la chasse ?
Q2 -  
Comment reprendre du poil à la bête ?
   R -  
Je ne serai jamais une terreur de trottoir et je reviens toujours bredouille de mes chasses. Alors, au retour, rue Saint-Denis, je vais tirer une ou deux cartouches sur la toison mignonne d’une bichette professionnelle qui m’appelle "mon lapin". Je reprends ainsi du poil à la bête, si je puis dire, le seul risque étant de me tromper de gibier et de me faire plumer par une bécasse.

Q1 - Quelles sont vos origines ?
Q2 - Quel est le prix d’un Arc de Triomphe ?
R - Être un soldat inconnu, tué au combat, n’avoir donc eu comme berceau qu’un funeste champ de bataille, supporter ensuite les guignols qui viennent régulièrement vous honorer pour cela, tel est le prix à payer pour occuper à jamais un prestigieux tombeau.

Q1 - Quelle étiquette faut-il suivre ?
Q2 - Il avait quel vice, Archimède ?
 R - Sur la voie du péché, il faut savoir s’arrêter à temps, s’interdire les plaisirs solitaires que la morale réprouve et que la religion condamne. Chers enfants, ne plongez pas votre âme dans cette eau impure et ne la poussez pas, tel Archimède dans sa baignoire, dans la spirale d’un vice sans fin.

Q1 - Pourquoi a-t-on dix orteils ?
Q2 - Pourquoi y a-t-il autant de mouches ?
  R - Moi je me compte un orteil de plus, pile-poil au milieu des dix autres, et je n’en prends que mieux mon pied. Je me fiche du sacrilège politique de cette imparité, et je me réjouis de la Valls des mouches curieuses qui viennent, de gauche comme de droite, taquiner ce centriste joyeux.

Q1 - C’est quoi une hypotypose ?
Q2 - Quel est ce jeu ?
  R - C’est un jeu thématique qui consiste à trouver, dans un premier temps, une intersection rhétorique ou descriptive entre l’éthopée et la prosopopée ; la diatypose et l’ekphrasis n’interviennent qu’ensuite. Dès lors qu’elles sont bien comprises et maîtrisées, les notions d’épiphrase et d’ellipse, de palinodie et même de métonymie, participent de concert à l’harmonie imitative du discours et à son orchestration argumentative ; elles deviennent de simples jouets progressifs bien plus que des instruments posopographiques, mais oui. Voilà un jeu nouveau que les très jeunes enfants vont adorer et qui va structurer leur verbiage de manière ludique. Arreuh, arreuh !

Q1 - Qui l’eût cru ?
Q2 - Qui a mangé le dernier cannibale ?
  R - Le dernier cannibale n’est plus, il s’est dévoré lui-même, hélas ! Tout cru s’est-il eu, donc, mettant là une fin inattendue à la faim héréditaire qui assura toujours la survie — et le renom — de sa tribu d’intellectuels. C’est la barbarie de notre propre civilisation qui l’aura conduit à cette tragique immolation. Puisse notre mémoire honorer ce martyre et mépriser ipso facto la ridicule marmite d’Hergé. Puissent surtout les philosophes méditer sur le meurtre anthropophagique du père. Montaigne défend l’idée que la moelle d’un enfant qui mange ses parents (sans dénaturer leur chair par une indigne cuisson) devient pour ceux-ci la plus honorable des sépultures, et il suggère que la récurrence infinie de ce geste assure, en quelque sorte, une vie éternelle à tous les communiants. Le suicide du dernier cannibale, acte ultime de cette longue eucharistie, traduirait-il l’aube d’une fantastique et générale résurrection ? Merci à ce jeu de nous permettre cette réflexion toute faite de délire et d’espérance.

Q1 - Que fait-on le samedi quand on rit le vendredi ?
Q2 - Quand vas-tu cesser de te retenir ?
  R - Moi je ris le vendredi, et seulement le vendredi. Tous les samedis donc, malgré mon tempérament jovial, je contiens mes éclats de la veille, et cela jusqu’au vendredi suivant où je cesse de me retenir et où je me libère à nouveau. Ce cycle hebdomadaire est sans doute une réaction convulsive et psychanalytique aux contraintes chrétiennes qui ont fait du vendredi un jour d’abstinence et de sacrifices. Mes amis disent que je suis bizarrement programmé et ils rigolent de moi toute la semaine, eux.

Q1 - Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été avait, en s’en allant, négligemment jeté cette faucille d’or dans le champ des étoiles ?
Q2 -
Vous espérez quoi, à la fin ?
  R -
Si Booz ne se réveille pas dans les cinq minutes, j’abrège la stupide contemplation que l’on m’impose et dont j’ai ras-le-bol. Je prends cette foutue faucille et je m’en vais couper du jonc. Hé, hé ! En fin de compte, avec ou sans Booz, j’espère être reconnue comme une sainte femme : Ruth dans la Bible ou Jeanneton dans un bréviaire. Larirette !

Il est minuit, docteur Schweitzer

Q1 - Qui a donné l’heure au Docteur Schweitzer ?
Q2 -
Et maintenant, que diable comptez-vous faire ?
  R -
Un grand gorille vient tous les soirs, à minuit pile, enculer le docteur Schweitzer. Voilà, c’est fait, et moi qui suis l’assistant du bon docteur je vais aller maintenant, comme toutes les nuits, ajuster nos montres à cette horloge naturelle. Et je vais essayer aussi de comprendre, une fois de plus, le mécanisme biologique qui fait de cet aimable animal un comptable aussi précis du temps qui passe. Mais cette ponctuation est un mystère dont mon intelligence ne peut que rester à l’écart ; c’est avec humilité que je vois donc dans cette créature et dans sa saillie phénoménale une manifestation du génie du Créateur.

Q1 - Qui a donné l’heure au Docteur Schweitzer ?
Q2 - L’homme descend du singe. Et le singe, d’où descend-il ?
  R - L’Univers est l’oeuvre d’un grand horloger et toute vie découle de son fabuleux mécanisme, cela a été dit maintes fois. Mais le grand singe qui vient honorer le bon docteur Schweitzer toutes les nuits, 12 bons coups d’affilée, descend assurément d’une horloge plus prosaïque..

Q1 - D’où tenez-vous cette belle assurance ?
Q2 -
Pourquoi ouvrir cette cage ?
  R -
Moi je suis un gorille, LE gorille. Je maîtrise les règles africaines de la séduction sauvage. Dans ma savane natale n’ai-je point sonné telle une horloge, de 12 coups tous les minuits, votre excellent docteur Schweitzer ? Que fais-je alors ici, en plein midi sur cette place de marché surpeuplée d’épaisses et identiques femelles ? Je ne sais. Je suis pourtant certain de pouvoir étonner agréablement ces mégères qui m’observent derrière les grilles qui me retiennent. Si on souhaite que ce jour de marché reste dans les annales de Brive-la-Gaillarde, que l’on m’ouvre donc cette cage indigne ! Merci à Georges Brassens de me comprendre et me défendre aussi bien.

Q1 - Minuit est l’heure de quoi ?
Q2 -
Quel est votre meilleur souvenir ?
  Réponse du Dr. Schweitzer -
Les 12 coups du grand gorille.



Proserpine

Edvard Munch

Dante G. Rossetti
Le Bernin

Q1 - De quel lieu Proserpine est-elle la déesse ?
Q2 - À quoi avez-vous envie de jouer ?
  R -

Bizarre déité, brune comme les nuits,
Au parfum mélangé de musc et de havane,
Œuvre de quelque obi, le Faust de la savane,
Sorcière au flanc d’ébène, enfant des noirs minuits,

[Pour jouer] je préfère à l’opium, au nuits,
L’élixir de ta bouche où l’amour se pavane ;
Quand vers toi mes désirs partent en caravane,
Tes yeux sont la citerne où boivent mes ennuis.

Par ces deux grands yeux noirs, soupiraux de ton âme,
Ô démon sans pitié verse moi moins de flamme ;
Je ne suis pas le Styx pour t’embrasser neuf fois !

Hélas ! et je ne puis, Mégère libertine,
Pour briser ton courage et te mettre aux abois,
Dans l’enfer de ton lit devenir Proserpine !

Charles Baudelaire     


Q1 - Votre mère a les cheveux de quelle couleur ?
Q2 - Qui rit ?
R -

Une vache était là, tout à l’heure arrêtée.
Superbe, énorme, rousse et de blanc tachetée,
Douce comme une biche avec ses jeunes faons,
Elle avait sous le ventre un beau groupe d’enfants,
[Qui] sous leurs doigts pressant le lait par mille trous,
Tiraient le pis fécond de la mère au poil roux.
Elle, bonne et puissante et de son trésor pleine,
Sous leurs [rires parfois] faisant frémir à peine
Son beau flanc plus ombré qu’un flanc de léopard,
Distraite, regardait vaguement quelque part
.

Victor Hugo

Note : Cette mère-là est notre mère à tous, telle la Nature. Non ce n’est pas la vache qui rit !


Q1 - À quelle heure ouvrent ces jolies jambes ?
Q2 - Où vont tous ces gens ?
 R - Une strip-teaseuse fait un numéro d’horlogerie au cabaret Vitruve. À 2 heures 46 minutes et 9 secondes exactement, ce sera la fête pour les amateurs de symétrie qui seront arrivés à temps. Mais que les retardataires se rassurent, ils pourront revenir à 3:41:32, 4:36:55, 7:23:05, 8:18:28 ou 9:13:50. (Note : à 5:32:18 et 6:27:41 le spectacle sera forcément moins intéressant, voir ci-dessous. Avant 2 heures et après 10 heures, l’acrobate se repose, c’est dommage.)


L’horloge du cabaret Vitruve

Les heures correspondant à des aiguilles symétriques verticalement sont données par la formule   Y = 60*(12-X)/13, où X est l’heure en nombre entier (entre 0 et 12) et Y le nombre décimal de minutes.


Foot-ball : France-Ukraine, novembre 2013


Question 1 - Qui décide pour vous ?
Question 2 - Celui qui a les boules, qui est-ce ?
Réponse de Franck Ribery, le 16 novembre 2013 -  (cliquer ici)

Question 1 - Que ferez-vous si votre équipe perd ?
Question 2 - Mettons cartes sur table, qui restera sur le carreau ?
Réponse de Didier Deschamps, le 17 novembre 2013 -
(cliquer ici)



suite du jeu : cliquer ici

 

Le discours du père de la mariée
(31 mai 2003)

 

 

« Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval le soir d’une bataille
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit… »

                        VICTOR HUGO. Après la bataille.

 

     Quand Émilie et Clémence étaient bébés, je venais tous les soirs dans leur chambre pour leur raconter des histoires, et lorsque j’arrivais à cours d’imagination, je leur récitais des poésies. Comme ces chères petites avaient respectivement moins de trois ans et moins de deux ans, elles ne comprenaient pas toujours grand chose à ce que je disais ; je m’efforçais seulement de leur parler avec conviction, d’une voix musicale pour les intéresser, et avec des effets de théâtre pour les amuser. Le souvenir que je gardais de quelques textes puissants me procurait aussi l’occasion de les déclamer pour moi-même, tout fort, et cela sans craindre les moqueries que ma mise en scène aurait suscitées chez n’importe qui d’autre que chez mes deux petites filles. Tous les soirs donc, « Mon père ce héros… » s’intercalait entre du Racine et du Ronsard, entre du Baudelaire et du Mallarmé… À vrai dire je ne faisais que répéter pieusement la propre mise en scène de mon père qui, drapé tel César dans une vaste serviette de bain et dans un lyrisme hugolien, transmettait les témoins de ses émotions littéraires à ma sœur, à mon frère et à moi-même, tous les trois délicieusement terrifiés parfois, et blottis l’un contre l’autre dans un même grand lit.

    « Mon père ce héros… » À défaut d’être moi-même un héros, sans doute eussé-je fait un bon acteur dans un théâtre pour enfants. Car le vibrato de ma récitation, le fameux cri surtout, le pathétique « Caramba ! » que je poussais en brandissant un pistolet fictif, fascinaient Émilie qui, quelques vers plus loin, après la chute fameuse du chapeau, après le recul du cheval et après le dernier vers sublime, dans le silence et l’immobilité revenus, me suppliait : « Papa, dis-nous encore Mon père ce héros… » Et je récitais donc le poème à nouveau, sans me faire prier davantage, bénissant Victor Hugo pour ce bienheureux et nouvel instant qu’il m’offrait avec mes deux petites filles.

    Tout cela se passait avant qu’Émilie eût trois ans. Le 11 mars 1977, la veille de son anniversaire, alors que la routine du soir me conduisait une fois de plus à leur narrer l’héroïsme d’un père et à leur suggérer celui possible de tant d’autres, voilà qu’Émilie m’arrête à l’instant même où je vais commencer mon numéro, et elle me dit :
   — Papa, je sais.
   — Tu sais quoi, ma chérie ?
   — Je sais « Mon père ce héros… »
Et voilà qu’elle me récite le poème tout d’un trait, sans qu’un seul instant cette délicieuse enfant ne me quitte du regard, consciente (mais oui !) de l’or qu’elle fait couler dans mon cœur !

   Père sensible, fier évidemment de la performance de sa petite fille, d’autant plus fier que c’était là la transmission du message de mon père, cet instant reste gravé dans ma mémoire. Ma mémoire est pleine de riches instants passés avec Émilie, mais celui que je viens de relater est l’un de ceux qui continuent à m’émouvoir le plus ; c’est à cause de la jeunesse de l’enfant, bien sûr, et à cause aussi de sa continuité avec moi qu’elle assurait, dès le jour de ses trois ans, de manière innocente et drôle, en récitant les vers symboliques et fétiches de ma propre culture.

   Puisqu’il est d’usage qu’un père fasse un bref éloge de sa fille lors de son mariage, c’est donc cet instant merveilleux que j’ai voulu rappeler ici. Par cette évocation heureuse, je dis également à Émilie toute la joie qui est la mienne de l’avoir eue, et de la garder, comme enfant. Et c’est un grand plaisir pour moi, et pour Odile aussi, de confier aujourd’hui notre fille à Nicolas, son héros que nous aimons tant, et dont le « sourire si doux » nous laisse déjà imaginer d’autres moments de grâce dans les chambres de leurs enfants à venir.

   Mon discours serait évidemment incomplet si je ne disais le bonheur que je sais, aujourd’hui, être celui de Clémence ; elle est plus que jamais présente auprès de sa chère grande sœur ; elle est ici ; elle rayonne parmi nous ; sa joie nous environne ; son rire se mêle aux nôtres. Merci, à vous tous qui êtes là, de l’entendre.

---------------------------------------------

Note : lire ici l’homélie du frère Alain Quilici, dominicain.

---------------------------------------------

Post scriptum, mars 2008 : Lire la triste suite ici, hélas !

retour                                                 haut de page

 

 

Prière du poisson

Du fond de la mer, ô Seigneur,
Aye pitié d’un pauvre pécheur ;
Écarte de lui vil saigneur
Ou si oncque le prend pêcheur
Épargne lui froyde terreur
Que ce ne soit Chris l’éventreur.
retour                                        haut de page

 

 

        La Liste OULIPO (OUvroir de LIttérature POtentielle), dans la mouvance de Raymond Queneau et Georges Pérec, réunit sur internet des amateurs de poésie fortement contrainte. Par courrier électronique chacun envoie ses exercices ou messages à un ordinateur central qui les réexpédie ensuite à tous les abonnés et donc aussi à l’expéditeur lui-même.

       Un comble pour une liste publique vouée à la littérature française : les lettres accentuées et d’autres caractères spéciaux sont transformés par l’informatique ingrate d’OULIPO en des symboles aussi abominables que des charançons et qui rendent toute lecture impossible.

        Ainsi mes propres "enfants" littéraires subissent automatiquement à leur naisssance les injures et la noirceur de ce filtre infâme avant d’être bientôt proposés, tachés ou salis, à l’indifférence obligée et froide des colistiers qui demeurent donc privés des messages qu’ils accueillent. Par le même courrier, ces textes sont aussi rendus automatiquement à leur père, tout distordus telles des horribles reliques. Ô sort ennemi qui condamne le poète à la stérilité et à la solitude de sa nuit !

      Mais les lettres envoyées par les barons de la Liste échappent, elles, à ces chancres. Existerait-il donc, sans que je le connaisse, un moyen informatique pour protéger ma verve d’une telle vérole ? Puisque dans cette compagnie d’esprits distingués qu’est l’OULIPO on se plaît à parodier des textes célèbres, j’ai écrit l’avatar suivant de Stéphane Mallarmé afin que l’on me vienne en aide :

    (Note : les mots en rouge ci-dessus sont réutilisés dans le poème)

 

Don du message

Je t’apporte l’enfant d’une nuit d’Idumée.

Noire, ingrate et saignante, et pâle, et déplumée,
Par ton filtre que tache un charançon qui dort
Ou tes verres salis — hélas ! — d’un chancre encor,
OULIPO tu te ris de ma verve publique.
Et bientôt, quand tu as rendu cette relique
À ce père essayant un sourire ennemi,
La solitude bleue et stérile a frémi.

L’indifférence avec sa fille l’innocence
De ses pieds froids accueille l’horrible naissance
Qu’une lettre répand en vérole et tocsin...
Ô vous, barons bien nés, priverez-vous du sein
Où coule en sa noirceur sibylline l’infâme
La Liste des esprits que la Contrainte affame ?


Pour lire l’original de Stéphane Mallarmé cliquer ici.

retour                                           haut de page

 


 

      Les adhérents de la liste OULIPO, sur internet, s’exercent traditionnellement et de façon académique à écrire des avatars du sonnet de Gérard de Nerval El Desdichado (Le Déshérité). On peut en lire beaucoup sur le site de Nicolas Graner, et quelques chefs-d’œuvre dans le livre collectif de Camille Abaclar . On trouvera ci-dessous deux de mes propres exercices, dans le goût de Baudelaire et de Verlaine.

     Pour lire le poème original de Nerval, cliquer ici ou .

SED SACIADA


Pour toi, Prince des Veufs, la Matrone a hélé
Dans ses bordeaux pouilleux six catins d’Apulie
Pour élever ton luth à leur ciel étoilé,
Plus noires d’émilion que de mélancolie,

Ces Lunes nuitamment t’ayant donc consolé,
Tu rends le Pô — six lippes ! — à la mère Italie
Alors qu’au lupanar, sans cesse cajolé,
Du nectar de ton cep tu arroses sa lie.

Nul éphèbe à tes us ! Loin les mœurs de Bijòn
Qu’un Rouge avait baisé sur le front des arènes !
Non, ivre dans la Grotte humide des six reines

Tu as versé deux fois, ô lettré vigneron,
Les mots de la dulie et le vin de l’Alphée,
Recueillant douze cris, abolissant Morphée.

Charles B. de Lerval

 

EL BORRACHO DEL PROCOPE


Prince girondin suis, au Procope exilé ;
Aux châteaux aquitains seul mon gosier m’allie.
Veuf de bocks abolis, un soleil m’a hâlé,
Aussi noir que mon encre et que moi-même : Hollie,  (1)

Sur ton zinc, dans ma nuit, que d’alcool j’ai sifflé !
Et ce pot-ci, lippé de la mousse à la lie,
Fleure en mon cœur les vers dont, jamais dessoûlé,
Je t’inonde Jennie et t’arrose Sallie.

Suis-je Amour ou Bacchus ? Rabelais ou Bibron ?
Mon nez est rouge encor mais ma plume est sereine
Car j’ai bu cet esprit qui teint et rassérène.   (2)

Et j’ai, bourré cent fois, confondu cuilleron
Et crayon, l’encrier et mon verre, assoiffé
De soupirs et d’absinthe et d’écrits au café.

Paul Neirvale

(1) C’est elle, la sainte qui soupire !

(2) Neirvale a bien écrit « qui teint et rassérène » et non pas « qui teint et rase Irène ». Il a eu raison car non seulement cela n’aurait eu aucun sens, mais encore et surtout, soyons logiques, pourquoi teindre Irène si c’est pour la tondre ensuite ? (Aragon de Tarazcon)

retour                                                                                        haut de page

 

 

       Dans le cadre de la Liste OULIPO, sur Internet, voici une de mes réflexions sur

l’analyse mathématique
de la "signature" implicite des textes
.

Je réponds ici à une intervention de Gilles Esposito-Farèse dont on peut trouver trace dans les archives de la Liste.

        La présentation de diverses contraintes littéraires, « snobinardes » et autres, par une formulation mathématique unifiée ne manque pas d’intérêt. On sait le désir des physiciens de trouver la loi unique de laquelle procéderaient les diverses interactions qui font la cohérence de la matière, et on devine leur jeu à généraliser de si vastes intentions. La théorie matricielle exposée par M. Esposito-Farèse reste cependant humble par rapport à ce qui est envisageable. Projeter chaque mot dans l’espace vectoriel à 26 dimensions constitué par les 26 lettres de l’alphabet, et s’assurer que deux mots consécutifs sont orthogonaux, constituent une démarche de base, si je puis dire, pour assurer entre ces mots une différence propice à la richesse du langage. Imposer cette orthogonalité de manière elliptique, c’est à dire choisir une matrice de pondération dont toutes les valeurs propres sont réelles et de même signe, constitue l’approche la plus naturelle ; le cas particulier des 1 sur la diagonale principale avec des zéros partout ailleurs correspond, comme le fait remarquer M. Esposito-Farèse, à la métrique euclidienne élémentaire qui vient tout d’abord à l’esprit. On peut préciser ici que le choix d’une matrice moins creuse, au gré de chacun, ne peut que tordre la contrainte et déplacer le texte vers d’autres mots, d’autres significations, d’autres sons, d’autres poésies… Cette voie est évidemment compliquée dans la mesure où elle revient, dans le plus simple des cas, à transposer la contrainte non plus sur des occurrences de lettres isolées mais sur des groupements de lettres. Ces groupements, qui ne sont autres que les vecteurs propres de la matrice de pondération, peuvent être définis comme les « mots propres » de la contrainte. Il est clair que le choix préalable de ces mots, leur groupage en matrice, leurs poids associés, rendent possible l’identification convenable de la matrice de pondération. La présence de mots propres complexes (au sens mathématique de ce mot), ainsi que le suggérait ce matin un « oulipote » avisé, ouvrirait une voie de recherche encore plus intéressante à cause de son abstraction.

       Le passage à une contrainte hyperbolique, c’est à dire à une matrice de pondération présentant des valeurs propres réelles mais de signes différents, ouvre une voie encore plus difficile dans la mesure où il faut maintenant différencier les mots propres ; comme le fait remarquer M. Esposito-Farèse avec le partage simple des consonnes et des voyelles, il y a ceux qui sont associés à un poids positif et ceux qui sont associés à un poids négatif. Mais le vrai problème, dans tout cela, est de savoir si cette complexité accrue (par rapport à la contrainte elliptique), au delà du jeu et de la curiosité, va dans le sens de l’amélioration du texte, alors que rien déjà ne permet d’affirmer que le contrainte elliptique garantisse notre plaisir poétique. Cela est certes possible, mais qui pourrait l’affirmer ? Qui pourrait démontrer que le vers célèbre de Hérédia cité par M. Esposito-Farèse tire sa beauté de l’orthogonalité minkowskienne qu’il y découvre et qu’il qualifie de « sacrément édifiante » ? Ou qui pourrait dire le contraire ? Qui pourrait dire que Dieu, dans la phrase citée de la Genèse, a mieux fait d’être un snob hyperbolique plutôt que d’être un snob elliptique (lui dont le fils fera plus tard dans la parabole) ? et pourquoi son choix a-t-il été celui-là ? En fait, sur ces exemples, on ne fait qu’observer le respect fortuit de contraintes. La plupart des abonnés de cette Liste, pour s’y être essayés avec plus ou moins de réussite, savent qu’un excès de contrainte dérive vers l’inintelligibilité du texte et que cela ne s’accompagne pas forcément d’une amélioration de la musicalité ni du mariage heureux des mots. Car le respect trop strict d’une contrainte nuit à la beauté (l’intérêt) qu’elle est censée promouvoir en dernier lieu. Une femme aux lignes et au dessin trop parfaits nous apparaît comme un être lointain et non descriptible, alors que sa simple beauté nous est révélée soudain par quelque défaut découvert ; ainsi la contrainte poétique ne révèle-t-elle vraiment un texte qui lui est soumis que lorsqu’elle n’est qu’approximativement respectée, voilà qui est banal et déjà dit, et la beauté d’un texte contraint devient-elle donc un compromis entre le respect de ladite contrainte et son viol.

      Pour en revenir à notre problème initial, remarquons maintenant que l’espace vectoriel engendré par les 26 lettres de l’alphabet est trop restreint pour rendre compte de la qualité des sons, et que c’est bien dans l’espace de tous les phonèmes qu’il faudrait travailler. Voilà une vaste entreprise !

      Pour mieux comprendre et mesurer l’agencement des mots et des sons, il serait intéressant d’analyser un fragment de texte célèbre pour ses qualités poétiques et sonores. A l’aide d’algorithmes savants, on pourrait identifier ses « phonèmes propres » ainsi que la matrice de pondération correspondant à la contrainte de laquelle il s’approche le plus, mesurer le degré de violation de cette contrainte, faire glisser la fenêtre d’analyse sur le texte complet, observer ainsi l’évolution de ces paramètres, constater ou non une certaine invariance, établir des statistiques, refaire tout cela pour des textes différents d’un même auteur, comparer, trouver ainsi une sorte de signature cachée... Question : avec de tels outils ensuite (je parle des vastes matrices de pondération identifiées par ces analyses), parviendrions-nous à créer le même beau que celui dont nous aurions ainsi extrait la clé ? Non, bien sûr, car l’âme du poète échappe aux équations ; mais, chemin faisant, nous pourrions découvrir, deci-delà, de nouvelles « oulipoteries » et y prendre du plaisir.

     Je ne suis sûrement pas le premier à formuler de tels délires ; je ne doute pas que M. Esposito-Farèse n’y ait songé, et bien d’autres sûrement.

    Cordialement.

    ALP

(lire ici la réponse de Gilles Esposito-Farèse)

retour                     retour à travaux scientifiques                haut de page

 

 

OULIPO, Pelleteuses tueuses

Chantal Robillard

      Juin 2009. Lire ici le magnifique poème de Chantal Robillard "Pelleteuses tueuses". Les seules voyelles présentes sont e et u. J’écris à Chantal Robillard :

      Chère Chantal,

      Rentré hier soir de Luxembourg (vous savez que ma fille Emilie habite désormais là-bas), je vous ai répondu un peu vite ce matin, d’un mot, parce que j’étais pressé. Mille choses urgentes à faire avant de partir en Bretagne dans quelques jours et pour deux mois. Au temps où je participais à la Liste Oulipo [...] j’avais toujours dénoncé l’excès de contrainte littéraire comme une restriction à la beauté elle-même, tout en reconnaissant qu’elle était une source paradoxale de liberté et de beauté à condition qu’elle fût habilement "modérée". Par ces propos j’apportais un très modeste écho à la fameuse dissertation d’Ollivier Pourriol au concours général, un texte [que j’avais] communiqué aux membres de la Liste qui m’en avaient fait la demande. Cette confrontation de la contrainte et de la liberté, sur un pur critère de beauté et de sens, établissait pour le mathématicien que je suis (que j’étais) le principe d’un optimum régi par des efforts antagonistes, subtilement opposés.

      Votre poème, donc lu rapidement ce matin, et relu ce soir plusieurs fois, est sûrement l’un des plus beaux qui m’aient été proposés dans le cadre Oulipo (après votre hommage à ma fille Clémence, bien sûr). La contrainte moderne à deux voyelles, à laquelle sont sacrifiées celles (les contraintes) de la poésie classique — c’est un choix esthétique — y est suffisamment douce pour ne pas altérer votre puissant message ; vous n’auriez pas dit l’essentiel si la contrainte avait été trop forte, et vous l’auriez dit avec moins de force si la contrainte avait été plus faible. Bref, vous situez votre texte douloureux et beau à l’optimum dont je parlais plus haut. [...]

      J’envoie copie de ce message à M. Esposito-Farèse, que vous citez. Cette question d’optimum sous contrainte, pour banale qu’elle puisse paraître, avait fait jadis un sujet de discussion entre nous, un peu perdu dans une affaire de définitions mathématiques complexes et ludiques. J’en profite pour demander ici à GEF la permission de mettre sur mon site, pour étoffer un peu celui-ci, la réponse qu’il m’avait faite alors.

retour                                                             haut de page

 

 

Pour la naissance de Rosa

Au bonheur de Rosa

Sur sa chair : le velours que neuve la rose a !
Dans sa bouche : encor l’eau dont Amour l’arrosa !
Son pas : léger et tel que Terpsichore osa !
Sa voix : qu’elle résonne au loin du morose ! Ah,
Oui ce sont là nos vœux pour la douce Rosa !

 


Faire-part :

Xavier et Yolande sont heureux de vous annoncer la naissance de Rosa. La maman et la petite se portent bien, le papa est aux anges.

Réponse :

Maman aux langes, Papa aux anges : enjeu de maux en jeu de mots !

retour                                                             haut de page

 

 

COUP DUR POUR UN MOU


     Dans le langage synthétique de la politique européenne, section contrats machinchosiques et coopérations trucmuchales, certains descriptifs sont appelés "Memorandum of Understanding" . Dans cette communauté austère où la langue anglaise est d’usage, l’abrégé MoU est de règle.

   Sur le site internet d’un important organisme international, on trouve ainsi l’information suivante concernant un projet de coopération technique :

     La mission du [groupement], selon son MoU, est de [...]
           * Renforcer [...]
           * Stimuler [...]
           * Concentrer [...]

     Souvent de tels projets sont morts-nés, passés aux oubliettes après avoir occcupé des fonctionnaires zélés, ou bien encore sont-ils conservés dans des archives formolisées pour servir à l’éducation des technocrates à venir. Cela m’a inspiré le quatrain suivant :

Voilà bien le projet sans bémol
D’un fol MoU qui espère là dur
(Tel jadis en son for Balladur)
De ne pas finir dans le formol.

retour                                                  haut de page

 

 

LE FEU AU CUL


"Une belle femme solicitant St François de coucher avec elle, il se mit au milieu d’un grand feu, lui disant que c’étoit là son lit. "

(image et légende extraites du livre de Erasme ALBERE, L’Alcoran des Cordeliers, gravures de Bernard Picart, 1734).

 

        Labeur de l’une sans la bure de l’autre ! Pour échapper à l’enfer, le pénitent s’est jeté tout nu dans le feu ; mais là, pourtant, ce sont la tentation et le désir qui le consument encore et qui maintiennent ostensiblement sa vigueur. Car la belle n’attise pas seulement les braises de l’âtre en déclarant sa flamme, mais elle continue également d’exciter un ermite dont la piétié est devenue inopérante. Pousuivi jusqu’au bout de sa fuite, il va maintenant succomber, c’est sûr ! Ah ! luxure, quand tu nous tiens ! Les chenets d’un foyer ou bien les bras d’une allumeuse, la rotissoire ou la cocotte, hélas ! Il n’y a pas d’autre choix pour le bonhomme, il est cuit.

       On remarquera aussi, et voilà un édifiant paradoxe sur lequel il faudrait disserter, comment le feu sacré d’une gourgandine peut participer à l’érection d’un principe religieux. Bernard Picart, l’auteur de cette gravure, n’a gelé ni son imagination ni son burin, et il propose ici une brûlante illustration de l’idée selon laquelle tout système génère en lui-même sa propre contradiction.

      Enfin, de manière plus prosaïque, l’artiste suggère qu’aucune fournaise, pas plus qu’un bain glacé, n’aurait raison de la chair assurgente du saint homme. Au vu de l’ardeur et de la forme intactes qu’il laisse à celui-ci en sa torride situation de refus, il nous convainc même que " le feu au cul " n’est pas une vaine expression.

retour                                                                                  haut de page

 

 

L’ALBATROS

(d’après Charles Baudelaire)


Souvent pour s’amuser, des caddies en tapage
Prennent un albatros, vaste oiseau des éthers
Qui suivait, indolent compagnon de voyage,
Les chariots roulant sur les fairways amers.

Quel golfeur au moment de tirs héliotropes
N’a donc jamais rêvé d’espace ou de cosmos ?
Et, déchirant d’un fer la demeure des taupes,
N’a vu dans son divot une aile d’albatros ?

Or installé tout juste, à l’adresse sur l’herbe,
Ce roi du vaste azur, maladroit, en chandelle
Lance piteusement sa balle ; et sa superbe,
Tout juste devant lui, va tomber auprès d’elle.

Ah ! le joueur ici, comme il est gauche et veule !
Lui naguère si beau, qu’il est comique et laid !
L’un singe son swing avec un brûle-gueule,
L’autre mime en topant l’infirme qui volait.

Tel joueur est semblable au prince des nuées ;
Il plane dans son ciel l’été comme l’hiver,
Mais au golf, en exil au milieu des huées,
Ses ailes de géant molzouillent son driver.

(primé par Golf-Magazine, 2002)

retour                                           haut de page


 

LES DEUX CADRES

(l’inclination de l’un explique
l’inclinaison de l’autre)

Est-ce un penchant coupable, enfoui tel un tourment,
Qui incline Jouaillec de ce fort penchement 
Dont le trait de Fabien, malicieux instrument,
Suggère le mobile à notre sentiment ?

Ou la photo est-elle un fol arrangement ?
Car le cliché trompeur laisse voir un fragment
D’un autre cadre encore accroché joliment
Mais que l’horizontale accuse ingénument.

HOMMAGE À FRANÇOIS JOUAILLEC

(caricature golfique de son éditorial d’Envergures-ONERA, juin 2000)   

 
     Vaste entreprise ! Plans scientifiques et stratégiques, plans quinquennaux répétés, plans d’actions sans cesse repensés en rêve, etc. Ne suis-je pas déjà bien pourvu en intentions programmatiques ? N’est-il pas d’ailleurs quelque peu illusoire de toujours chercher à planifier une activité sportive marquée intrinsèquement par l’aléa, le risque et le hasard ?

     En réalité, plus qu’un plan supplémentaire, ma nouvelle orientation golfique sera la synthèse concrète et l’aboutissement de ces différentes démarches. Elle m’engage, moi-même ainsi que ma tutelle familiale, dans une vision ambitieuse et réaliste de l’avenir appuyée par les objectifs précis que je me suis fixés avec les partenaires qui se penchent sur mon cas.

     Vision ambitieuse, car c’est à travers mon swing aérien, mes slices, mes draws et mes air shots, que l’ONERA et l’industrie aéronautique investissent dans la préparation du futur. Voici naître des concepts et des outils techniques susceptibles de retomber sur tout le secteur du golf. En suscitant des ruptures dans une technologie où j’ai déjà beaucoup investi, ils éclairent mes nouveaux choix.

     Vision réaliste car mon évolution s’accélère, les industries se regroupent autour de mon corps, mille professeurs se positionnent autour de moi, se partagent mes ressources... Tenant compte de cet environnement et ayant du golf un sens inné, poil au nez, il me faut prendre des options claires pour ne pas rester au bord du green, poil aux narines.

     Mettre en cohérence leurs perspectives commerciales avec mes symboliques moyens, leur partenariat avec mes projets de handicap, et les appliquer dans un exercice difficile mais également participatif et synthétique pour le parcours 2001-2004, tel est bien mon objectif.

     Servi par un mental d’acier, non je ne suis pas l’albatros de la parodie de Baudelaire qu’a écrite Alain Le Pourhiet ! Car — oui ! — je possède de vrais atouts pour convaincre mes partenaires zélés (1) : la qualité de mon grip scientifique et technique, mon organisation moderne et rationnelle sur les lies en pente, mon positionnement stratégique dans les bunkers attractifs, ma forte expérience des roughs... Et surtout, même sans mes lunettes, voir la photo ci-dessus, une très forte motivation pour faire enfin le par.

 

(1) Jouaillec fait ici une allusion très subtile à ses partenaires ailés, birdies, eagles et autres albatros.

retour                                                  haut de page

 

 

Mme Disdéri, photographe

Mme Disdéri phot., 65 rue de Siam, Brest


     Le conservateur des archives de Brest refuse de faire l’acquisition de deux photographies que je lui propose, deux portraits réalisés en 1860 par la photographe brestoise Mme Disdéri. Malgré la rareté de telles images, la raison invoquée par le conservateur est l’ignorance de l’identité des personnages représentés. Ma réponse :

     Cher Monsieur,

     Je comprends votre argument, bien qu’il ne soit pas celui de la plupart des conservateurs à qui je fais des propositions identiques. Si nous savions qui sont les personnages de ces photos, celles-ci perdraient de leur mystère et un peu de leur poésie. Le trésor des archives (et des simples collections comme la mienne) réside autant dans leurs secrets que dans la connaissance qu’elles impliquent. Ces deux petites images sont de notre patrimoine ; il devrait vous revenir, à vous ou à vos successeurs, de les "conserver" et de découvrir un jour, au hasard de vos recherches, les identités non encore révélées des personnages qui attendent là.
     A l’appui de cela, je vous propose un parallèle que vous comprendrez. Le collectionneur que je fus sut toujours tirer son principal plaisir non pas de l’acquisition ni de la possession d’un objet, mais surtout de la recherche qu’il implique, et donc, paradoxalement, de l’ignorance. L’ignorance et la recherche, c’est la vie ; la connaissance ensuite, c’est la mort. Vieux débat !
     Pour le Brestois exilé que je suis, trouver des photos de Mme Disdéri ou des papiers salés de son illustre époux ne fut jamais chose facile. A l’heure où je disperse tout ce que j’ai acheté durant ma vie, mes deux petites photos vont donc rejoindre le monde mercantile d’où je les avais laborieusement extraites. Hélas !

retour                                           haut de page

 

 

ESPRIT


Seule la lumière de l’esprit peut éclairer l’esprit. (Ziao Tung Fu)
retour                                                     haut de page

 

 

Avec Sarkozy, c’est un vent d’allégresse qui souffle sur le blé

(photo prémonitoire prise le 6 mai 2007 quelques heures avant le résultat de l’élection présidentielle)

retour                                                        haut de page

 


 

Un peu de politique

 

Qu’est-ce que c’est :

A) "Une gavosphère", i.e. un double entonnoir à promesses pour gaver deux électeurs à la fois. (1)
B) "Une ségosphère", i.e. un dispositif en fer pour soutenir les arguments plutôt mous d’une candidate. (2)
C) "Une photosphère", i.e. un appareil photographique qui restitue les reliefs (féminins et autres).

Pour connaître la solution et voir des déclinaisons érotico-psychédéliques de cet objet, cliquer ici

(1) Campagne électorale : Gaver l’essaim de paires au dessin de la mère ! Ah !
(2) Après l’élection : Ah, l’amer dessein qu’elle perd quand l’autre appert dès ceint !

(Note : Pour une meilleure connaissance du mot "appert" (apparoir), cliquer ici).

retour                                                        haut de page



Hommage à Lionel Decramer,
spécialiste du cadastre romain en Afrique du Nord,
pour ses 60 ans

Hommage aussi à son assistant Roland Orion.




LA  HALTE  DES  CARAVANIERS

1

C’est le soir. Sur l’ocre hamada, une houri
Au bord de l’oued à sec a allumé un feu  
Sur lequel, pour jouer, un enfant souffle un peu.
Là-bas sur le djebel, se tient un méhari

Immobile. Tout est calme dans le Rimapée.
L’heure, lentement, glisse dans la nuit. Plus loin
Un sirocco emporte le chant d’un Bédouin
Dont l’écho ponctué semble une mélopée.

On se repose donc, et la journée s’achève.
C’est l’heure familière où l’on taille bavette
En roulant sur la pierre le mil et la galette... 
"Merde !" dit Lionel qui d’un bond se relève.

suite  ici

retour                               haut de page



 Un départ à la retraite

      Chaque fois que j’ai assisté à des cérémonies de départ à la retraite, j’ai toujours eu l’impression de voir les autres partir de façon irréversible vers une destination lointaine et mystérieuse. Et j’ai toujours été étonné, alors, de leur optimisme et de leur espoir dans une certaine nouvelle jeunesse pleine de projets et d’activités exotiques. C’est à mon tour aujourd’hui, mais je n’arrive pas à croire à la nouvelle jeunesse qui commencerait pour moi demain, tant j’ai l’impression, depuis les 34 ans et un mois que je travaille ici, de vivre benoîtement une même jeunesse prolongée. Le premier septembre 1971, date de mon embauche au CERT, c’était hier, et je n’aurais donc vieilli que d’un jour. Quand je me regarde dans une glace, mes traits me paraissent toujours les mêmes, et force m’est d’admettre que les évolutions que j’observe autour de moi, le vieillissement des autres, cachent une réalité qui m’échappe ou à laquelle j’échappe. La marque du temps m’aurait-elle évité ? Non sans doute, mais cette vérité ne m’apparaîtra vraiment que demain. Vivons donc le jour d’aujourd’hui, fût-il le dernier de cette jeunesse-là : carpe diem.

      Carpe diem. J’aurai eu la chance, comme la plupart des gens ici qui en sont conscients, d’avoir vécu une vie professionnelle privilégiée. N’étant pas un tueur, car sinon je me serais battu dans un autre arène, j’aurai eu ici une vie plutôt facile quand on la compare à celle que d’autres mènent ailleurs. Avec quelques inconvénients, certes, ce fut une vie plutôt sympathique et légère qui m’aura permis, comme à d’autres, de garder parfois un comportement estudiantin et de prétendre à de véritables joies intellectuelles. Et c’est ce passage d’une vie d’étudiant à une vie de retraité, brutale donc, sans transition que je puisse bien comprendre, qui m’interpelle aujourd’hui. Votre présence à tous, ici, aujourd’hui, chers amis, me dit que je ne rêve pas. Oui, votre présence autour de moi, signifiant mon réveil, marque la fin d’une bienheureuse quiétude.

      La vie de chercheur est valorisante, et je l’aurais bien prolongée encore un peu si mes dernières recherches, celles qui concernent le contrôle des phénomènes vibratoires en aérodynamique, à l’intersection des intérêts de différentes branches de l’ONERA, avait pu franchir le cap d’impossibles goulots administratifs. Hélas ! C’est ainsi, et je laisse mes dernières idées à qui voudra bien s’y intéresser. C’est là ma seule amertume.

      Tout en regrettant l’absence aujourd’hui de certains collègues retenus en mission par obligation professionnelle, j’ai plaisir de voir dans votre présence à tous l’amitié que je porte en principe à tout le monde, et je vous en remercie. Je remercie particulièrement ceux qui, dans une période terrible de ma vie que l’on sait, m’ont aidé et empêché de sombrer, ce fut là un privilège. Je vous remercie enfin pour ce cadeau que vous m’offrez aujourd’hui et qui me rappellera, dès demain, ma belle vie auprès de vous.

ALP, le 30 septembre 2005

retour                                                        haut de page

 


Hommage à Yves Sévely

chercheur distingué et professeur d’Automatique à l’université de Toulouse

à l’occcasion de son départ à la retraite

 

Il

S ystème lumineux et clair ;
É chantillonage multiple de valeurs fiables ;
V ariables de cœur maximisant gentillesse et courtoisie ;
E tat aux seules contraintes de probité ;
L inéarité (pour droiture) ;
Y
aurait assez de roses

Pour que le bas de cette page
"À la fin de l’envoi je touche".
Mais si autres lettres font mouche
Le rebelle i grec clôt l’hommage
Qu’à fin Sévely donc je pose.


ALP, 1995

retour                                                        haut de page

 


(novembre 2006)

ONERA MAMMOUTH

 

    Lorenzo Figura, un brillant étudiant italien accueilli à Sup’Aéro dans le cadre du projet européen ERASMUS, s’étonne de l’absence de publication des recherches effectuées sous ma direction lors de son stage à l’ONERA. C’est que son travail a été fait conjointement dans deux départements d’administration différente, et qu’aucun minime budget n’a pu à être débloqué ensuite pour achever cette étude et mettre ses résultats en forme. La lourdeur administrative de la machine ONERA et le positionnement de petits chefs, font passer à la trappe des résultats scientifiques importants. Lorenzo Figura, à qui je réponds ici, a postulé aux Graduate Schools du Caltech, du MIT, de Princeton et de Yale, aux Etats-Unis. J’ai fortement appuyé toutes ses candidatures et Lorenzo fait actuellement son doctorat à l’université Yale.

lire la suite ici

retour                                                        haut de page

 

 

Corbillard et neiges éternelles


Photographie anonyme, ca 1860


     Jacques Joos est un artiste spécialisé dans les peintures murales et dans la représentation picturale des étoffes. Autrefois scientifique, devenu mystique après avoir survécu à une chute en montagne, il croit à un déterminisme divin qui exclut la notion de hasard. Jacques a été choisi pour réaliser sur trois ans la fresque de l’église d’Horre, un petit village des Hautes-Pyrénées. Au moment où il va commencer son travail il ignore encore que, sous l’autorité d’un auteur qui va raconter son histoire en direct, il provoquera ici la mort bien étrange d’une femme pourtant éternelle.

      « Au lendemain de son arrivée à Horre, après un petit déjeuner matinal sur la terrasse attenant à sa chambre, Jacques éprouva ce trac bien normal qui le prenait au début de chaque fresque. Mais une angoisse sans fondement l’amplifiait aujourd’hui. Pour la fuir, il s’exerça sur un canson à transcrire son émotion face au paysage de montagnes qui s’offrait à lui ; depuis le creux d’un nuage jusqu’à celui d’un glacier, il fit glisser la lumière du matin comme sur une fronce de satin. Cet exercice lui parut bon, un présage optimiste pour le long travail qu’il allait entreprendre. Confiant, il quitta alors sa chambre en sifflotant, salua quelque personne d’un mot gentil, puis sortit. Au bord de la route, en face de l’hôtel, le corbillard du village, vieux d’un siècle, avait été garé durant la nuit. Les neiges dites éternelles, là-haut, écrasaient de leur majestueuse blancheur et de leur indifférence ce pou disgracieux et tout noir dont la fonction consistait à ponctuer un temps insignifiant pour elles. Jacques essaya de s’amuser des contraires qu’opposait cette image insolite, respira profondément comme pour éviter une nouvelle appréhension, puis il se dirigea vers son chantier. »

(extrait de Cantique, chapitre 1)

retour                                                        haut de page

 



TROMP

retour                                                haut de page

 

 

Automaticité et automatitude : une question de politique


Contrôle automatique en "feedback" d’un système non-linéaire complexe


        Automaticité
est un mot rare (1). Après avoir cru en 2008 à une erreur de Jean-Pierre Raffarin (2), ou hier à une invention verbale audacieuse de François Hollande, je dois reconnaître que je me suis trompé, car ce mot existe bel et bien. Dans leur utilisation d’un terme néanmoins peu usité dans le langage courant, et même inconnu de certains spécialistes qui pourraient l’intégrer à leur jargon, j’ai admiré l’effort de ces deux-là, à quelques années d’intervalle, pour casser drôlement la monotonie d’un discours politique tristounet.

        Jean-Pierre Raffarin aura utilisé au moins une fois le mot automaticité, mais François Hollande en est friand dès lors qu’il s’oppose ainsi avec justesse, mais non sans exciter notre malice, à l’imagination linguistique de son ex-pseudo-maritale consœur.

       Sur certains sites internet où je me suis renseigné, on dit que le mot automaticité serait synonyme d’automatisme. Ce n’est pas vrai. Certains suffixes (-ité, -isme, -ique, -itude, etc.) permettent de différencier et classer des mots de même racine, parfois semblables, selon des critères subtils de sens et de logique ; mais leur juste usage semble néanmoins réservé à des initiés éclairés, rompus aux finesses d’un langage mûri lui-même aux soleils de l’esprit. Hé ! (3)

        J’ai questionné des ingénieurs et chercheurs automaticiens qui, loin de bidouiller seulement des servo-mécanismes comme on pourrait le croire, élaborent avec crayon et papier des théories et des équations compliquées afin de mieux comprendre les mécanismes de "feedback" qui régissent les ordres scientifique, social, économique et politique de notre monde. Après une fumeuse et longue réflexion, certains de ces savants-là m’ont affirmé que l’automaticité, ce mot que je leur faisais donc analyser sinon découvrir, relèverait d’abord de la cybernétique et de ses sciences parallèles ou dérivées, à moins que…

       À moins que… Mais oui, mais c’est bien sûr  !


(ALP, blog du Figaro, 26 septembre 2011)


(1)
Automaticité = caractère de ce qui est automatique (voir le site du TLF). Ce mot n’apparaît dans aucun dictionnaire au 19e siècle, ni dans les grands Larousse (reliure rouge) du début 20e. Il semblerait qu’on le trouve pour la première fois dans le Larousse de 1928, mais il ne figure pas dans le Dictionnaire de l’Académie Française de 1931. Il sera repris ensuite dans les diverses éditions du Quillet. Actuellement il est absent du Dictionnaire des mots rares et précieux (Editions 10-18) ainsi que du livre Trouver le mot juste (Paul Rouaix, Armand-Colin, Le Livre de Poche).

(2) Le Figaro du 17/09/2008. Jean-Pierre Raffarin, ex premier ministre, dixit : "Je pense qu’un ministre, quand il quitte le gouvernement, doit avoir le sentiment d’avoir accompli sa mission, et il ne doit pas rechercher le confort d’une nouvelle situation. [...] L’automaticité ne me paraît pas être dans l’esprit avec lequel Michel Debré et le général de Gaulle ont pensé nos institutions".

(3) Automaticité, automatisme, automatique, automation, automatie, automatisation, tous ces noms-là existent. Après sa fameuse "bravitude", on attend maintenant que la féconde Ségolène Royal nous invente le mot "automatitude" afin d’enrichir la panoplie ci-dessus. Une variante orthographique "automattitude" pourrait même définir l’attitude automatique de ladite "politicieuse" (4), une attitude qui est forcément la conséquence directe de sa propre automaticité. Suivez le fil.

(4) Politicieuse : là c’est moi qui fait du zèle.

retour                                                haut de page





Faux clone ou vrai clown ?


Un politicien inné, poil au nez

 
       
Les dialogues de François Hollande sont peu constructifs. Il revient sans cesse à Sarkozy quelle que soit la question qu’on lui pose, comme pour se constituer une allure de guerrier (don Quichotte), ou comme si c’était là un artifice pour ponctuer un flux continu de banalités ou d’évidences. Sa focalisation obsessionnelle sur Sarkozy éveille chez lui un processus répétitif qui pourrait étayer la dissertation ci-dessus relative à l’automaticité. François Hollande prononce le nom de Sarkozy comme une bigote égrène son chapelet, c’est mécanique. Ou radote-t-il comme Caton l’Ancien : Sarkozy delendus est. Ou plus prosaïquement ne parvient-il pas à s’arrêter ainsi qu’un vieux moteur qui ferait de l’auto-allumage.

        En espérant couvrir plus large, François Hollande défend simultanément moult idées et leurs contraires. Or seul l’élément zéro est identique à son opposé, c’est d’ailleurs sa définition. Ainsi François Hollande, en mélangeant tout dans un discours invariable, se place-t-il en défense de rien du tout, et donc en position de neutralité pour ne pas dire — d’un point de vue mathématique — en position de nullité.

        Certes François Hollande souhaite le mieux-vivre des Français, il a raison et on l’applaudit. Mais tous les candidats, quel que soit leur bord politique, ont forcément ce même objectif. Ce que FH devrait nous dire, plutôt que d’enfoncer des portes ouvertes, c’est la manière concrète dont sa politique contribuerait à ce mieux-vivre. Ce n’est pas en dérivant vers une critique sempiternelle et systématique de son adversaire politique que le candidat FH va nous informer des propositions innovantes qu’il cache dans sa besace. Notre actuel président, que je n’aime pas particulièrement, travaille dur en ce moment, au four et au moulin, jour et nuit, avec une abnégation et une réussite indéniables ; et il s’explique ensuite de manière réaliste et claire. Les propos de Sarkozy écrasent facilement ceux de l’autre mou du bout dont la réponse en forme de martelage litanique peut paraître alors comme une traduction de jalousie ou un aveu d’impuissance. Hol est un bouffon qu’on nous colle tout fol et mol à peine sorti du formol. Lol !

        Les efforts de Nicolas Sarkozy portent quelques fruits en politique étrangère, et aussi dans l’affaire économique européenne où sa réussite, même si elle est laborieuse, en association avec la chancelière allemande, suscite dles encouragements internationaux. François Hollande ose néanmoins tout rejeter en bloc et en se gardant bien, au milieu de ses dénonciations récurrentes et lassantes, de nous dire quelles autres décisions stratégiques auraient été les siennes. Comprenons seulement que, dans son ignorance du dossier grec, FH n’aura défendu Papandréou que par solidarité de principe avec un parti homonyme et cousin du sien, tous ces partis-là fussent-ils noyés dans la même erreur ou seulement englués dans des magouilles électorales ou des diktats de chapelle.

        Dans la correction technique de certains taux de TVA, François Hollande voit « la preuve  de l’inconstance et de l’incohérence » de Nicolas Sarkozy depuis cinq ans. Pour extrapoler si grand à partir d’un détail si petit, le candidat vizir n’aurait-il pas vu plus loin que le bout nouveau de son nez ? Se serait-il trompé de sens dans la prise de sa lorgnette ? Dans cette énième dénonciation, sachons donc discerner l’incompétence et la mauvaise foi chronique du candidat Hollande ; et en l’absence de contre-propositions, écoutons résonner le vide caverneux de son soi-disant programme.

        Retour à notre question première : François Hollande est-il un faux clone de l’autre fantôme ou un vrai clown à part entière ?

ALP
blog du Figaro, 7 novembre 2011

retour                                                haut de page


 

Le rouge et le vert



       J’ai lu ou entendu les derniers propos tenus par Eva Joly. Chapeau !

       Fuyant toutes les personnes politiques asservies aux lobbies, ces marionnettes-là dont l’arrivisme étouffe notre pays, je rends hommage à une personne qui sait, toute femme qu’elle est, montrer aux autres vendus ce que c’est d’avoir des couilles ! Respect.

       Les idées d’Eva Joly ne sont pas les miennes, mais elle a néanmoins toute mon admiration. Je souhaiterais que les défenseurs officiels de mes propres idées, ces politicards si souvent lamentables, eussent une telle honnêteté. Et les media de tous bords, occupés à manipuler les masses plutôt qu’à les informer — tels ces guignols ex-comiques devenus si peu drôles à force d’obéir aux directives de leurs employeurs et sponsors — tuent la vertu dont nous avons d’abord besoin. Entre les abysses économiques qui nous aspirent, et l’opportunisme à court terme de certains qui promettent de nous en sortir, c’est Melancholia qui se dirige droit vers nous. Attention à Marine Le Pen, dit-on, mais c’est peut-être l’électro-choc dont la France a besoin.

       Le respect d’Eva Joly et l’imitation par tous de sa droiture seraient l’ébauche d’un premier bouclier contre le pire.

ALP
blog du Figaro, 23 novembre 2011

retour                                                haut de page

 

 


Devinette

Marin on m’appelait Jean, et j’ai régné sur l’océan.
Sur toute la surface du globe je continue de faire la pluie et le beau temps.
Dans les profondeurs marines je fus et reste un prince carnassier.
Associé avec mon cousin du sud, ce sont les bourgeois que j’effraie aujourd’hui.
La société tente de me ridiculiser sous le prénom de Jo,
et dans les bistrots on vient boire sur mon dos.
Les étrangers qui prononcent mal mon nom font vite marche arrière.
Je fais cracher leurs poumons à ceux qui me tutoient.
Un mot particulier me décrit en furie.
Mes coups assomment ceux qui m’affrontent.
Prononcé deux fois, mon nom sème la terreur.
Ma littérature vole bas et ne plaît qu’aux enfants.
Personne n’arrive à croire que je suis beau…

… Et pourtant ma musique est celle de Dieu !

Qui suis-je ?

La solution est ici.

retour                                                haut de page

 

 

Guignoleries

 

       Après une brillante époque, les Guignols de l’Info se retrouvent actuellement au même niveau de médiocrité et d’ennui que l’ancien Bébête Show, une autre émission soit-disant humoristique qu’ils dominaient jadis avec aisance et esprit.

       Aujourd’hui le parti-pris politique des Guignols rend plutôt sinistre ce qui devrait être des caricatures amusantes. Depuis belle lurette le personnage de Sarkozy y est traîné de manière récurrente dans l’indignité, tous les membres de l’UMP sont présentés comme des pré-fachos ridicules, les deux Le Pen comme des monstres, Bayrou comme un débile, et tout cela sans oser vraiment toucher à François Hollande. Les Guignols assiègent le subconscient des téléspectateurs en profitant de leur pouvoir de faire sourire. Mais sans guère d’humour désormais, c’est mon avis, ils assènent directement leur propre choix politique et leur propre conception de ce qui est bien, en enlevant ainsi à leur émission la puissance de suggestion que permet la drôlerie à partir d’un exagération intelligente. Les Guignols semblent vouloir seulement orienter les spectateurs vers les idées du parti socialiste, ce qui n’est pas leur rôle. Je me sens pris en otage, je ne ris plus, et donc je ne les regarde plus. Idem : je ne lis plus le Canard Enchaîné dont les flèches ne partent plus que dans la direction du vent.

       Le plus grave c’est que la majeure partie du monde des journalistes, à la télévision et à la radio surtout, à l’instar des courtisans Guignols, flattent le favori des sondages comme dans l’attente de quelque future reconnaissance. Cet asservissement est désolant. Il n’est qu’à comparer les interviews de Hollande, de Sarkozy et de Marine Le Pen sur les deux principales chaînes de TV aux heures de grande écoute pour observer le manque d’objectivité des meneurs de jeu et des autres journalistes invités. A force de dénigrer Nicolas Sarkozy — jusque dans son attitude pourtant louable lors du drame que notre pays vient de vivre [l’affaire Mohamed Mehra] — on se rend compte que les media veulent avant tout nous éduquer et que l’information qu’on nous sert est biaisée. C’est navrant.

ALP

Notes :

1) Article refusé par le modérateur d’un blog du Figaro, 27 mars 2012.
2) Article refusé par le modérateur du blog de l’Express le 31 mars 2012. Pour justifier sa censure, Eric Mettout, rédacteur-en-chef de L’Express.fr, m’écrit : " Vous nous insultez, nous, et gravement. Ce que je ne peux naturellement tolérer sur notre site."

retour                                                haut de page


Le Renard et le Corbeau
(ne pas confondre avec Le Corbeau et le Renard)

(d’après une idée de Paul Sansonetti, 5 ans)


Maître Corbeau, sur un arbre perché, 
Tenait en son bec un fromage. 
Maître Renard, par l’odeur alléché, 
Lui tint à peu près ce langage : 
«  Hé bonjour, Monsieur du Corbeau,
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau ! 
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois. »
À ces mots le corbeau ne se sent pas de joie 
Car — non pas pour montrer ici sa belle voix  
Il vise, ouvre son bec, laisse tomber sa proie
Qui éclate en coulant sur les poils du goupil.
« Mon bel et bon Monsieur, dit notre oiseau subtil
À l’animal souillé, sachez
que tout flatteur
— De nos fables fût-il le plus rusé menteur —
Devrait se méfier de celui qui l’écoute.
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute. »
Le renard empestant et honteux et confus
Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus. 


(ALP,  mars 2013)

(en rouge : remplacements et adjonctions au texte de La Fontaine)

retour                                                haut de page

 


Plan de table

 

P = N * K1 + K2
R = N modulo 2
I  =  K2 + (R-1) * K1 * (–1)**K2


On cherche à disposer N couples autour d’une table ronde en s’imposant deux contraintes :  

1) Alternance des hommes et des femmes.
2) Les éléments de chaque couple doivent être aussi loin que possible de leur conjoint.

On peut démontrer, de manière compliquée, que la solution est évidente.

cliquer ici (pdf)

retour                                                haut de page

 

 

Pygmalion contrarié

Un auteur amoureux de son héroïne descend dans son roman
pour y rencontrer la femme qu’il y a inventée. Hélas !

 

 

         Des pas qui s’approchaient, le frou-frou de sa robe, le souffle de sa respiration… Ma fascination de cette femme effaçait soudain ma peur de sa démence. Envoûté, j’oubliais Jacques. Au centre du vestibule, une colonne me cachait l’encadrement de porte où Hortense venait de s’arrêter comme si ma présence l’y eût stoppée tout net. En me déplaçant un peu, seulement un tout petit peu, je l’aurais vue. Mais je préférais attendre quelques secondes encore, délicieuse crainte où j’enfouissais ma hâte. Et puis si Hortense demeurait là en silence et sans bouger, c’est peut-être qu’elle retardait aussi, dans le même désir suspendu que le mien, l’instant de notre rencontre ?

         Je ne voyais donc pas Hortense, mais sa présence enveloppait jusqu’à mon cœur dont le rythme s’accélérait. L’instant s’attardait, se dissipait dans une dimension qui n’était plus le temps, hésitait aux bifurcations d’une cartographie où le monde matériel, sans cesse divisé en espaces semblables à lui-même, s’exténuait en un foisonnement de ramifications infinitésimales avant de s’évanouir, comme dilué, dans une sève de laquelle naissaient alors, continûment, des turbulences intellectuelles. Là, à la frontière indistincte entre le sensible et le mental, le vertige me gagnait d’être et simultanément ne pas être.

         Paradoxalement, l’inconsistance même du plasma qui engendrait, nourrissait et transportait mon imaginaire, paraissait accabler Jacques ; il s’y engluait et ne parvenait pas à me suivre. J’observais en effet que les mouvements de mon ami se faisaient de plus en plus difficiles ; il s’immobilisa bientôt dans un quelconque geste puis demeura aussi inerte que les grandes statues en pied qui occupaient derrière moi les angles du vestibule. C’est que nul personnage réel, pas même lui, n’aurait pu me suivre dans le rêve où je plongeais tel un bienheureux. Seul, intégré à la fiction de mon roman, je m’apprêtais à découvrir enfin la femme que j’y avais inventée.

         Lorsque je me décidai à esquisser un mouvement, la même idée était venue à Hortense, elle se pencha aussi, mais dans l’autre sens, si bien que la colonne resta un obstacle entre nous. Je m’inclinai alors de l’autre côté, mais elle fit de même et me demeura cachée encore. Au moment où je jaillissais pour l’apercevoir sans qu’elle dût pouvoir m’échapper, elle avait à nouveau anticipé et bondi de telle sorte que je ne la vis pas plus. Tous nos gestes se contrariaient ainsi dans leur symétrie autour de la colonne, une neutralité régie par une mécanique dont je découvrais le système et où des antagonismes me liaient à mon héroïne dans le principe et la cohésion d’un corps unique. Même dans les dédales de mon intrigue, fussent-ils parsemés de pièges, je sus alors qu’Hortense me resterait toujours inaccessible ; elle ne m’apporterait rien qui ne fût déjà en moi. Et je compris aussi qu’aucune fable échafaudée sur mes rêves, aucun stratagème, ne me ferait atteindre à la vérité secrète de Jacques, celle-là que j’avais si vainement cherchée d’abord puis transférée sur mon héroïne afin que, par amour peut-être, elle me l’offrît en retour.


ALP

(extrait de Cantique, chapitre 13)

retour                                                haut de page

 


Marianne et Madelon



14 juillet 1919

La Tour d’Auvergne et Henri Collignon, morts au Champ d’Honneur

Henri Paul Collignon, préfet puis secrétaire général de l’Elysée et conseiller d’Etat, s’était engagé volontairement en 1914, à 58 ans, comme simple soldat porte-drapeau. Il est mort au front, le 15 mars 1915, à Vauquois, dans la Meuse, en allant porter secours à un blessé.


        Arrivé trop tard devant mon poste de télévision, je n’ai pas vu le défilé militaire mais seulement la maîtresse du président serrer la main d’anciens combattants. J’ai trouvé cela  gênant, et je me suis étonné qu’aucun des soldats que la belle feignait ainsi d’honorer n’ait refusé cet hommage factice. Mais peut-être pensaient-ils que le chef de nos armées, comme pour rendre hommage aux héros des fronts de 14-18 et de 39-45, avait choisi comme compagne de lit une brave et simple cantinière de troupe ?

(ALP, lefigaro.fr, 15 juillet 2013)



14 juillet 2013
retour                                                haut de page

 

 

Valls et Dieudonné

article censuré sur un forum du Figaro

 

        Principe de base, que j’énonce en début de cet exposé pour éviter toute interprétation fausse des propos à suivre : Dieudonné est une ordure. Guy Bedos aussi mais celui-là est du bon bord. Moi je propose qu’on les mette tous les deux dans la même poubelle, une poubelle qu’on fermerait d’un lourd couvercle par dessus, afin d’atténuer la haine et la puanteur ainsi conjuguées de ces pitres pathétiques. Qu’ils se détruisent là entre eux !  Mais l’essentiel se situe évidemment ailleurs.

        Le président de la République, dans une promesse aussi surréaliste qu’inconsciente, nous annonçait depuis des mois que la courbe de chômage allait s’inverser avant la fin de l’année 2013. Or celle-ci nous arrivait flanquée de mauvais chiffres, telle la planète Mélancholia à la fin annoncée de notre monde. Il fallait vite trouver — inventer — un écran de fumée pour détourner l’attention du bon peuple. Une altercation déjà ancienne entre un humoriste antisémite et un journaliste juif ferait l’affaire. A partir de la réactualisation de ce fait divers le gouvernement organise les manchettes des journaux entre Noël et le nouvel an, et le chômage catastrophique passe ainsi inaperçu au profit inespéré d’un bouffon qui se retrouve illico propulsé en tête de l’actualité sans trop savoir pourquoi.

       Or voilà que trop c’est trop et que le système s’emballe.

        Le racisme est un péché, tout le monde en convient ; la bonne morale sociale et politique est indispensable à l’équilibre du pays, tout le monde en convient également ; et Dieudonné, aux antipodes de ces essentielles valeurs-là, constituait donc un prétexte opportun pour conforter in extremis les bons vœux de notre président. Bonne année !

        Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, tout à son légitime désir d’être et de bien paraître, est l’inventeur de ce fameux rideau moral qui devait valoriser sa propre ingéniosité tout autant que dénoncer, en la masquant mal, l’incompétence du grand vizir en matière de lutte contre le chômage. Dans ce monde-là, tout le monde s’aime en public et se déteste en privé. Machiavel.

        Voilà donc que notre ministre, juste après nous avoir déjà étonnés de sa repentance des mauvaises conditions climatiques en Bretagne, demande aux préfets d’interdire les spectacles de Dieudonné au nom de la morale républicaine et de tout un amalgame d’autres bonnes et classiques valeurs. Le gouvernement définit autoritairement ce que doit être la pensée unique des citoyens, mais il leur laisse le foot-ball, merci pour eux.

        Le problème est que le ministre de l’Intérieur n’est pas un juge, pas plus que ne le sont les préfets, et qu’il ne lui appartient pas de décider si Dieudonné est coupable ou non. Et qu’il ne lui appartient donc pas de décider si le spectacle du sinistre bonhomme doit être supprimé ou pas. Associer ce spectacle à un trouble de l’ordre public est une galipette qui ne tient pas, car on ne peut préjuger d’une manifestation qui n’a pas encore eu lieu alors que les précédentes n’ont jamais engendré de troubles significatifs. Il ne reste donc, pour le ministre cherchant à se faire valoir, qu’à interdire à un mauvais penseur de penser, à un mauvais clown de faire rire, et à un mauvais Français de s’exprimer. L’Inquisition n’est pas loin, le bûcher est allumé, on songe aux goulags et à Ivan Denissovitch. Je sais, j’exagère, je plaisante, et Dieudonné n’est pas Soljenitsyne. Une pensée aussi pour madame Anastasie, symbole historique de la censure et muse inattendue d’un gouvernement se prévalant de liberté. [Post scriptum : bonjour ici aux censeurs du Figaro qui auront interdit le présent texte sur leur forum, voir l’image ci-dessous.]

        8 et 9 janvier. Après l’interdiction du spectacle de Dieudonné par un maire ou un préfet à la botte du ministre, le tribunal administratif de Nantes, statuant sur de pures raisons de droit et de constitutionalité, donne raison au méchant Dieudonné et autorise le spectacle au lendemain même de son interdiction. Quelques heures plus tard, juste avant l’ouverture des portes du Zénith de Nantes, un Conseil d’Etat convoqué en urgence par le ministre annule la précédente autorisation. L’état politique et asservi prime ici sur l’état de droit, et les pompes de M. Valls, ainsi cirées en haut lieu, brillent à nouveau de l’éclat qu’avait terni un tribunal subalterne trop sérieux et zélé.

        On peut avoir quelque sympathie pour Manuel Valls, c’était mon cas, une sympathie froide certes, venant de sa rigueur apparente. Mais, après le détournement du droit écrit au profit d’une morale subjective, cela par un ministre qui aura usé de son pouvoir pour imposer son propre jugement, voilà que j’ai moins d’estime pour lui.

        Nombre d’électeurs en quête d’humanisme politique sont forcément déçus par ces méthodes dictatoriales, et ils s’en souviendront dans l’isoloir. En démocratie la liberté d’expression prime sur la pensée exprimée qui est par principe sujette à discussion. Au constat des failles de notre économie et de notre identité nationale, et au constat de la distance que les partis dits de gauche prennent avec les Lumières de Voltaire et de Diderot, puis avec celles de Hugo, Zola, Jaurès et Badinter, voilà que Manuel Valls, en bafouant un principe sacré de notre Constitution et en exécutant un plouc malpropre, se fait un écho de Fouché.

        Circulez, il n’y a rien à penser.

ALP, le 9 janvier 2014

 


Le barbier Figaro et sa nouvelle conseillère, madame Anastasie.
Madame Anastasie est le symbole de la censure.
C’est le mariage du rasoir et des ciseaux.

retour                                                haut de page

 

 


Mr Hollande, I presume ?

image parue dans le lepoint.fr : voir ici

Historique de la rencontre de Stanley et Livingstone, lire ici


CENSURE

       Le titre ci-dessus, M. Hollande I presume, est une caricature des quatre mots célèbres de Henry Stanley. Je l’ai associé à une image extraite du journal Le Point. Mon commentaire de cette image, réduit à ce simple titre puis soumis à un forum dudit journal, ne plaît pas au modérateur. Ma plaisanterie est interdite. Censure, une fois de plus.

       Je réponds au point.fr et à son portier-modérateur :

       Votre censure est une injure (seulement apparente) qui vaut aujourd’hui à mon site internet, grâce aux attraits de l’interdit et à la divergence de l’information sur le web, plusieurs centaines de visiteurs ; ils s’en amusent, merci pour eux. Vous ne m’aurez donc pas fait tort, pas plus que les ciseaux tout rouillés que vous empruntez à la vieille et méchante Anastasie. Je ne faisais pourtant que reprendre l’illustration de votre article en changeant seulement son titre dans le contexte d’un humour basique mais néanmoins orienté vers la culture et l’histoire.

       Dites mon bon souvenir à votre censeur-en-chef, on se connaît. C’est une sorte de Javert moins rigide et moins droit, un clone rustique en quelque sorte. Car le vrai Javert, tout borné qu’il fût et tout méchant qu’il parût, ne fut pas sans noblesse. Né de Hugo, il était hugolien. C’est là une réflexion pour personne instruite, elle ne s’adresse pas à un quelconque moralisateur, ni à un portier à la botte éduqué pour filtrer et censurer, ni à qui croit juger bien en fonction des directives et des mots-clés qui lui ont été dictés. Bah ! Dans ce contexte votre censure est un honneur pour moi.

       Note qui a peu à voir : l’insolence de mon amusement reste bien en deçà de l’article tendancieux (Stanley et Livingstone) auquel je n’ai finalement pas répondu.

ALP, 5 février 2014

retour                                                haut de page

 


Adieu Charlie, bonjour les charlots !

Hommage à Charlie dans le goût de Charlie :
Charlot chez les charlots.
retour                                                haut de page

 

 


Entropie et filles de Loth

Catherine Lorent, exposition à l’abbaye de Neumünster, Luxembourg, février 2015


"Les filles de Loth"
(fragment)
Oui, l’entropie peut aussi prendre les traits d’une fausse blonde.

      Élément de conspiration [DOOM] 1
. 2015, encre de chine, aquarel sur papier, 480 x 2000 cm

    " Deux triangles s’engrènent. On voit une paire d’yeux dans l’intersection. Les principes maculin et féminin [bleu/rose], la couleur froide/chaude, ce qui se trouve en haut ressemble à ce qui se trouve en bas et vice-versa. Des boucles infinies s’étirent comme un ADN sur le chaos d’encre, du dessin automatique. Des formes régulières se répètent et forment un ordre. Cela crée une "rythmique". 
      Il s’agit d’un ornement vivant, qui transperce les principes universels comme l’entropie, l’expansion, l’ordre, le désordre et conspire contre le destin inexorable.
       C’est le visage de DOOM, qui voit tout et nous observe. "


       Étrange exposition dans un superbe musée de Luxembourg, le cloître de l’abbaye de Neumünster.

     L’art véritable et le génie se situent, pour la personne simple et certainement naïve que je suis, à l’intersection de la matière, du travail, de l’intuition et du talent. Doit-on être interpellé ici par la beauté et la finition du dessin, par l’intensité du message philosophique, par l’identité artistique et par l’authenticité machintrucmuchosique dont on lit les définitions dans des livres abscons et autres catalogues redondants ? On nous suggère que oui, car tous les ingrédients d’une authentique œuvre d’art auraient été réunis là par une intelligence éclectique. Les œuvres présentées sont à vendre mais ne sont pas à la portée de toutes les bourses, hormis celles de papa Loth que l’on voit en train de se les faire vider par ses filles, un bien joli dessin.

       L’explication écrite de la grande œuvre étalée sur le sol — une explication obscure que l’artiste se sent obligée de donner en s’empêtrant les neurones dans des concepts qu’elle ne maîtrise pas — fait référence à l’entropie et au désordre, voir ci-dessus. La différence subtile de ces deux notions n’apparaît pas ici clairement, c’est le moins qu’on puisse dire, et l’œuvre expliquée en devient même encore plus hermétique ; mais on est désormais supposé savoir que pour conspirer contre le destin inexorable il suffit de "transpercer des principes universels", ou vice-versa. Le texte poussif, écrit en renfort pour palier l’insuffisance de l’œuvre elle-même et compenser son absence d’esthétique, ne sert à rien ; bien au contraire, il révèle ce vide encore plus.

       Pour se convaincre de ce que je dénonce personnellement comme une supercherie artistique, lire ou relire le conte d’Andersen, "Le roi est tout nu..." C’est drôle et radical. Les lignes ci-dessous en disent plus que les miennes et que mille pages.

       Il y a de longues années vivait un empereur qui aimait par-dessus tout être bien habillé. Il avait un habit pour chaque heure de la journée. Un beau jour, deux escrocs arrivèrent dans la grande ville qui était sa capitale. Ils prétendirent savoir tisser une étoffe que seules les personnes sottes et incapables dans leurs fonctions ne pouvaient pas voir et proposèrent au souverain de lui confectionner des vêtements. L’empereur pensa que ce serait un habit exceptionnel et qu’il pourrait ainsi repérer les personnes intelligentes de son royaume. Les deux charlatans se mirent alors au travail. Quelques jours plus tard, l’empereur, curieux, vint voir où en était le tissage de ce fameux tissu. Il ne vit rien car il n’y avait rien. Troublé, il décida de n’en parler à personne, car personne ne voulait d’un empereur sot. Il envoya plusieurs ministres inspecter l’avancement des travaux. Ils ne virent pas plus que le souverain, mais n’osèrent pas non plus l’avouer, de peur de paraître imbéciles. Tout le royaume parlait de cette étoffe extraordinaire. Le jour où les deux escrocs décidèrent que l’habit était achevé, ils aidèrent l’empereur à l’enfiler. Ainsi « vêtu » et accompagné de ses ministres, le souverain se présenta à son peuple qui, lui aussi, prétendit voir et admirer ses vêtements. Seul un petit garçon osa dire la vérité : « Mais il n’a pas d’habit du tout ! » (ou dans une traduction plus habituelle : « Le roi est tout nu ! »). Et tout le monde lui donna raison. L’empereur comprit qu’il avait été ridicule, mais il continua sa marche sans dire un mot.

      Le conte complet d’Andersen : lire ici  ou écouter

ALP, février 2015


retour                                                haut de page


Mark Rothko

Maître d’école et tableau noir


       Je me suis rendu à Dusseldorf à la fin du mois de mai. En raison de travaux, seule la grande et célèbre salle du musée d’art contemporain était ouverte au public. On est écrasé là par une dizaine de toiles immenses et majeures, dont l’une est de Mark Rothko. Ce tableau n’est pas d’un noir uniforme comme il paraît sur la photo ci-dessus, mais selon la lumière incidente, de près on discerne des brillances et des reflets variés formant une sorte de dessin abstrait dans la masse des tons sombres. Quelques femmes de la bonne société étaient assises devant, écoutant un guide qui faisait penser à un maître d’école décrivant son tableau noir. Je m’approchai pour l’écouter aussi, mais il parlait en allemand, une langue que je ne comprends pas. En passant tout près du tableau, dérangeant brièvement la leçon, dans un frisson je ressentis un peu de l’étrange émotion — de la frayeur — que j’attendais. Car je n’ignorais pas, moi, à la suite des personnages de mon roman Cantique, qu’il m’aurait fallu traverser le tableau de Rothko pour en saisir toute la "matière" et accéder ainsi à une connaissance vertigineuse que je savais être mortelle. Explication ici.

ALP, juillet 2015

retour                                                haut de page


Marche avec Giacometti


participation au jeu-concours de l’exposition Giacometti, Landerneau, août 2015

retour                                                haut de page

 


Réponse aux bons vœux d’un anarchiste

 

Nous vous envoyons tous nos meilleurs vœux pour la nouvelle année
et vous embrassons bien fort.

Didier et L.
(30 décembre 2016)


       Cher Didier,

       Nos meilleurs vœux à toi aussi, et à ton épouse. Bonheur, santé, birdies, etc. La panoplie, quoi ! Tous nos vœux de ce que tu veux. Gros paquet-cadeau avec des jolis rubans roses comme tu les aimes. Hé !

       C’est la première fois que nous bénéficions de ta part, Odile et moi, de cette aimable attention ; et bourgeois comme nous sommes tu imagines à quel point cela nous touche. J’en viens à me demander si nos propres vœux en retour sont suffisants pour répondre aux tiens si massifs de nouveauté. Bah ! Nous règlerons plus tard ce problème de comptabilité et de balance. Pour l’instant je me laisse aller, sans calcul, à la joie de la surprise que tu nous fais.

       Mais aurais-tu changé, cher Didier ? Tel que je t’ai connu jadis — car voilà longtemps que nous ne nous sommes pas vus — ce genre de souscription à des règles protocolaires était ta négation. Je te savais farouche, serais-tu désormais docile ? Un néo-bourgeois aurait-il pris la place de l’anarchiste ? Les années assagiraient-elles le fou ? Le dur est-il devenu tout mou ? Bref, serait-ce un révolutionnaire repentant qui me présente aujourd’hui des vœux identiques à ceux des conservateurs que hier il pourfendait ? C’est suspect.

       Même si je ne te reconnais pas vraiment dans ton message lunaire et émoussé, je te garde intégralement mon amitié, une amitié piquée néanmoins des quelques susdites interrogations auxquelles tu apporteras sûrement bientôt, avec l’esprit qu’on te connaît, une plaisante réponse.

       L’image qui accompagne tes vœux (voir ci-dessous) est admirable, rare. Je m’y attarde. Beaucoup de rose, virant sur le cuisse-de-nymphe-émue ; on reconnaît là le goût d’un amateur. Et cette plage vierge nous aspire ; notre imagination y plonge à la recherche d’un vieux pote détourné de sa ligne... Hé, reste avec nous, Didier !

       Grosses bises à toi, mon grand, bien fortes aussi en échange des tiennes inattendues. Mais reviens-nous vite intact (entier), please !

ALP


retour                                                haut de page

 

UN EXCELLENT PLACEMENT



       Luca V.. est un ancien haut fonctionnaire européen du parlement de Bruxelles. De nationalité italienne, son épouse et lui ont choisi de passer leur retraite en France où ils ont de nombreux et anciens amis.

       Dans les années 1920-1930 le père de Luca était l’intendant financier du roi Victor-Emmanuel III,  et avec sa famille il vivait dans les dépendances du palais royal. Ainsi quand il était enfant, Luca jouait dans le parc du Quirinal avec le petit-fils du roi, l’actuel prétendant Victor-Emmanuel (né en 1937).

       Luca fut et reste un bel homme. Quand il était jeune il était, m’a-t-on dit, aussi beau que Marcello Mastroianni. D’ailleurs ils se ressemblaient tant que des femmes dans la rue se précipitaient parfois vers lui pour l’embrasser ou lui demander un autographe. Luca a une voix  grave et un parler magnifiques. Quand il parle en français, tout le monde se tait pour mieux entendre son accent chantant telle une musique fascinante. Il fut assurément un immense séducteur, et il le reste encore par sa beauté conservée autant que par sa gentillesse et sa finesse d’esprit. Une rareté quoi !

       Un jour, à table, chez moi, après qu’il m’eut parlé de son enfance quasi-princière, je fis passer à Luca un album de photos de ma collection montrant exclusivement des images originales des grandes famille régnantes de l’Italie d’avant Cavour : une cinquantaine de photos dont certaines étaient de la plus grande rareté. Valeur estimée : 5 000 euros, pour un prix d’achat dérisoire au marché aux puces. Et voilà Luca tout ému de feuilleter le bel album dont les pages le projetaient en quelque sorte dans un monde dont il avait vécu la décadence. Il en avait les larmes aux yeux. Soudain il me dit : "Alain, offre-moi cet album ! Sil te plaît, s’il te plaît, cet album, offre-le moi ! " C’était au dessert, et nous avions vraisemblablement un peu trop bu, l’un et l’autre. Moi d’abord assommé par l’audace d’une telle demande, mais bouleversé aussi par la sincérité de mon ami, et conscient du plaisir qui serait le sien si je souscrivais à sa demande, pouvais-je ne pas lui offrir un objet qui n’avait pour moi qu’une valeur d’argent alors qu’il valait tant pour lui ? Non. Alors j’ai donné, abandonnant pour notre amitié la somme vulgaire que j’aurais pu retirer de la vente de ces images. Luca n’a jamais su la valeur vénale du cadeau que je lui offrais, il s’en fichait, tout attaché à ses sentiments et à ses émotions ; je ne lui en ai jamais parlé. Luca est mon ami, et en fin de compte je ne regrette pas un geste spontané et de délicieuse lassitude qui, en toute amitié et dans une merveilleuse contradiction, continue chaque jour de m’enrichir plus encore. Un excellent placement !

(janvier 2017)



retour                                                haut de page


COMPOSITION CONSTRUCTIVISTE


désordre


      L’assemblage de ces 12 dalles géométriques en ivoire permet d’imaginer de belles constructions artistiques dans le goût de Malevitch ou de Mondrian.
      
Ainsi la considération de leur abstraction puis leur assemblage mental devraient éviter que l’on veuille désormais y poser son couteau.


ordres

retour                                                haut de page

 



(OULIPO)


FONDU AU NOIR

exercices oulipiens publiés sur le site internet Zazie mode d’emploi. Voir ici



La Cécité



    Tous les ans, le site internet Zazie Mode d’Emploi choisit, d’un membre de l’Oulipo, un texte jeté en pâture à qui veut bien s’en emparer. C’est là le prétexte à des centaines de détournements, pastiches, hommages, sous forme écrite ou non [...]. .Voir ici et ci-dessous le texte proposé pour 2019.

    "Il finit de traverser la rue et respire, soulagé. Ses derniers pas ont été les plus angoissants. Un moment, à mi-chemin, il a cru qu’il n’y arriverait pas. Et pourtant il s’était lancé d’un pas décidé, en pensant aux mots du poète : « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible aux yeux ». Maintenant il se réjouit d’avoir jeté sa canne avant de traverser. Comme ça, personne ne pourra dire que si les voitures l’ont évité, c’était pour ne pas écraser un aveugle."

Eduardo Berti et Martín Sanchez
Traduit de l’espagnol par Jean-Marie Saint-Lu


     Personnellement je vois dans la traversée de la rue, le retour de notre aveugle à la lumière, mais un retour qui serait impossible du fait d’une cécité irréversible. On se retrouve face à un problème quasi-métaphysique qui énonce que la Vérité, et la Connaissance, et Dieu, et la Lumière absolue… n’ont pas de sens de ce côté-ci de notre mort. Celle-ci s’impose comme le principe dual (inversé) du big-bang originel. Elle est aussi inaccessible à notre intelligence que ne l’est l’instant zéro de l’univers. On peut s’en approcher mais sans jamais l’atteindre, comme si le temps était défini, à partir de là, sur une échelle logarithmique. Dans notre fable la traversée complète de la rue serait donc l’image de l’accès impossible de notre esprit aux valeurs éternelles.

     L’aveugle, c’est à dire alors nous-mêmes, ne peut donc pas atteindre le trottoir d’en face, mirage ou pur concept, sinon en se faisant écraser par une voiture ou en se tirant une balle dans la tête. Icare lui-même, avait brûlé ses ailes dérisoires en s’approchant trop près du  Soleil et de sa Vérité. Voir ou revoir le très beau film d’Henri Verneuil I comme Icare, lire ici ma dissertation ancienne sur ce sujet ; et voir ci-dessous les trois variarions que j’ai ainsi proposées à Zazie.


SUICIDE A DÜSSELDORF

(De notre correspondant à Düsseldorf)

     Un événement dramatique a eu lieu hier soir, vers 18 heures, au carrefour de  Huttenstrasse et de Berliner Allee. Un aveugle s’y est suicidé d’une manière très curieusement préméditée. Alors qu’il s’apprêtait à traverser la rue, il s’arracha brutalement à la jeune femme qui lui servait de guide, puis il lança en l’air sa canne blanche avant de s’engager sur le passage clouté. Le feu de traversée était encore au rouge, ce qu’il ignorait et dont il se fichait évidemment. C’est étonnant qu’il ne se soit pas fait écraser par les nombreuses voitures qui passaient là à cette heure de pointe. Le désespéré s’était arrêté au milieu de la chaussée, les yeux au ciel, dans un concert de klaxons, comme s’il eût attendu une fatalité salvatrice. Celle-ci ne venant pas, il sortit de sa poche un pistolet et cria : « Vous êtes tous des aveugles, les véritables yeux sont dans l’âme, l’âme s’accomplit dans la mort, l’essentiel n’est visible que de là, ma traversée est terminée, enfin je vais voir. » Cela dit, il se tira une balle dans la tête. Les pompiers et les policiers, appelés, ne purent que constater le décès du malheureux.

ALP, novembre 2018


DESCENTE EN CÉCITÉ

(d’après Élévation de Charles Baudelaire)

Dans la cité bruyante aux strates étalées,
Fuyant de ciels rêvés les mirages amers,
Respirant la vapeur urbaine et ses éthers
Moins froids que les poisons des sphères étoilées,

Mon esprit tu te meus avec agilité
Et, tel un bon nageur qui se pâme dans l’onde
Tu sillonnes gaiement notre ville profonde
Dont le sol t’apparaît en fictive clarté.

J’ai quitté la torpeur de l’infini morbide,
Espace mental où dans l’air supérieur
Les aveugles distillent la pure liqueur
Dont je fuis désormais le symbole insipide.

Évacuant la foule de mes noirs chagrins,
Ma vision s"éveille et la voici heureuse
Car ici tout surpris de force vigoureuse,
Mes yeux viennent et vont puis s’étonnent sereins.

Conduite à ce bonheur ma cécité s’arrête
Et pour voir plus encor, je prends un libre essor
En traversant enfin, librement, sans effort,
La rue encombrée où… se mire une alouette !

ALP, novembre 2018


L’AVEUGLE IVRE

(échos rimbaldiens)

Au moment de franchir une rue impossible,
Ce soir j’ai refusé l’aide de mon haleur ;
Suite à quelque cafard je l’avais pris pour cible,
En balançant sur lui ma canne et mon malheur. 

Dans ce délire, peu m’importait de savoir
Qu’un soleil hystérique allait virer au vert.
Moi je vois seulement ce que l’Homme a cru voir,
D’un prisme hallucinant s’échappe un spectre amer.

Emporté par l’élan d’une foule impavide,
J’ai vite dépassé le premier caniveau.
Était-ce un arc-en-ciel tendu comme une bride
Qui m’aura fait guider par ce grossier troupeau ? 

Ensuite j’ai marché dans un couloir votif
Dont le bout s’éloignait tout comme j’avançais ;
Sa lumineuse issue était un point fictif
Ouvrant sur un éden dont je ne repoussais 

D’abord pas le semblant. Mais j’arrêtai bientôt,
Rejetant pêle-mêle espoirs et vains jalons.
Enfin, plût à Rimbaud hagard dans son bateau,
Je m’en allai, noyé pensif, à reculons. 

Jamais je ne verrai les clartés de la Ville,
Hélas ! ni les néons violant la rigueur.
C’est dans l’obscurité sans fin que je m’exile
Avec des oiseaux morts, sans future vigueur. 

Cette nuit je viendrai cultiver ma pensée
En rêve, et l’imposer au monde que j’ignore ;
Puis de la rue alors gagnant la traversée,
Je pourrai voir, voir, voir… ivre jusqu’à l’Aurore !


ALP, novembre 2018


retour                                                haut de page

 


(OULIPO)

QUENELLE À QUENEAU


exercices oulipiens publiés sur le site internet Zazie mode d’emploi. Voir ici



   Tous les ans, le site internet Zazie Mode d’Emploi choisit, d’un membre de l’Oulipo, un texte jeté en pâture à qui veut bien s’en emparer. C’est là le prétexte à des centaines de détournements, pastiches, hommages, sous forme écrite ou non [...]. .Voir ici et ci-dessous le texte proposé pour 2020.

Il se penche il voudrait attraper sa valise
que convoitait c’est sûr une horde d’escrocs
il se penche et alors à sa grande surprise
il ne trouve aussi sec qu’un sac de vieux fayots

On vous fait devenir une orde marchandise
qui se plaît à flouer de pauvres provinciaux
de la mort on vous greffe une orde bâtardise
la mite a grignoté tissus os et rideaux

Devant la boue urbaine on retrousse sa cotte
le lâche peut arguer de sa mine pâlotte
lorsqu’il voit la gadoue il cherche le purin

On regrette à la fin les agrestes bicoques
on mettait sans façon ses plus infectes loques
l’écu de vair ou d’or ne dure qu’un matin

Raymond Queneau



UN SÉJOUR CITADIN

Il cachait sa fortune au fond d’une valise...
Nul escroc pour voler cet écrin sans joyaux,  
Car voilà l’endroit où, provincial en crise,
Il mûrit un ragoût fermenté de fayots.

Il vomit ce purin qu’un néon pâle irise,
Gadoue infecte au creux de puants caniveaux ;
Un long mur linéaire accuse sa lourdise
Quand d’un geste d’appui il penche là son dos.

Bientôt vidé de son abjecte confiote
Saura-t-il faire face à l’épreuve idiote
Qui fait rêver le soir et pleurer le matin ?

Oui, car son regard las des obscènes breloques 
De vitrine, a croisé sous des clartés baroques
Celui, salace et fascinant, d’une catin.


Note :
Rimes conservées


BÂTARDISE

Avec pour tout bagage un semblant de valise
Que ne lorgnerait pas une horde d’escrocs,
Errant sur un trottoir, à sa grande surprise
Il trouve un sac percé où germent des fayots

Pourris. Ah ! se dit-il, la belle marchandise 
Que la Ville offre ici aux clochards provinciaux !
Penché là il se gave de la friandise,
Excité comme s’il grimpait à des rideaux.

Mais bientôt le voilà qui retrousse sa cotte ;
Vieux pochard maladroit à la mine pâlotte,
C’est sur elle pourtant qu’il vomit son purin.

Et plus tard, oubliant les agrestes bicoques
Sous un porche bourgeois, en ses infectes loques
Il rêve d’élégance et dort jusqu’au matin.


Note :
Les derniers mots de chaque vers sont ici ceux du sonnet initial de Raymond Queneau, sauf le mot "bâtardise" qui a été remplacé par "friandise", cette entorse n’étant justifiée que par la bonne compréhension du texte. En contrepartie j’ai intitulé mon avatar "Bâtardise", ce mot retrouvant là tout son sens dès lors que "avatar" et "bâtardise" peuvent dans certains contextes être considérés comme des synonymes. Mais le lecteur peut à son gré inverser "friandise" et "bâtardise", le mot "bâtardise" chez Queneau étant lui-même peu compréhensible, sinon comme une friandise intellectuelle ou littéraire, hé !



BIENVENUE À PANAME


(sur un air de rap)

(1)

La  gare est terminus pour tous les péquenauds.
Nous, la Horde, on sait faire un aimable accueil aux
Agrestes cul-terreux jouant les damoiseaux…
Pour celui-là trouvons, tout germés, des fayots
Et puis foutonluizy un sac plein sa valise.
— On offre à ces touristes l’orde marchandise
Qu’ils adorent : pour eux c’est de la friandise ! —
Mais si c’est un bâtard en mal de bâtardise,
Ou si avec des airs naïfs et provinciaux
Il vient pour nous flouer, qu’on lui brise les os
Puis qu’on en bourre alors sa valoche, en un coin
Discret, sombre... et duquel la Seine n’est pas loin !

C’est bienvenue à Paname, quoi !

(2)

Ici, Rusticaud, té chénou,
Et gare à nos coups de genou.
Ne reluque pas nos meufs, mec,
Car c’est nous seuls qu’on baise avec.
Sinon on descend bas ta cotte
Puis t’es foutu pour la cocotte,
Eh ! pâlotte face de mite !
Le caniveau c’est pour ta bite ;
Ton trip finira dans la boue
Un bain dans l’urbaine gadoue.
Enfin dans ton hôtel marron
On te pendra court au plafond
Avec un cordon de rideau
Et ce sera là ton cadeau

De bienvenue à Paname, quoi !

(3)

Ou bien retourne à ta fermette
Et rejoins ta bonne biquette
Dont les poils suiffeux et cradoques
Sont pires encor que tes loques.
L’extrême et fétide purin
Où patauge ton vieux bourrin
Fera sauce sur les fayots
Pourris et sur leurs asticots.
Fais venir tes potes bouseux
Pour s’en gaver et, tout gazeux,
Pour honorer des Parigots
Le dégueulis de haricots.
Et toi, réponse à ce festin,
Tu péteras jusqu’au matin

En souvenir de Paname, quoi !


ALP, décembre 2019

retour                                                haut de page


 

(OuLiPo)

LE  CORONAVIRUS
 
en vers et contre tous

Corot
nave
i russe


"Le coronavirus ne touche que les bourgeois car
personne dans le coron n’a virus." (Carolus Marxus)



     Sur un forum proche de l’OuLiPo, l’isolement pour pandémie entraîne en ce mois d’avril 2020 un déferlement de jeux de mots à partir de coronavirus, confinement, (hydroxy)chloroquine, Covid 19, etc. Anagrammes, palindromes, vers holorimes plus ou moins approximatifs, acrostiches, rébus, s’accumulent joyeusement dans nos boîtes aux lettres.



1

GABRIELLE ME TROMPE AVEC
LE CORONAVIRUS
(*)



Gabrielle d’amour, à l’écart de tes us
Je reste confiné ; tel est le processus
Quand tu ouvres ta porte à ce royal virus
Pourtant privé des feux latins de Romulus.

Voilà que te dévore un amant sans phallus
Plus friand de poumons que de monts de Vénus.
Ton seul masque est l’image horrible d’un rictus
Que ne peut effacer l’étude des corpus.

Tes sept chats consternés miaulent en chorus ;
Ton râle vient parfois briser leur consensus
Quand tragique il se mêle à ce dernier opus.

De l’ombre enfin — hélas ! — surgit Nostradamus
Pointant de tes baisers le fatal terminus
Et te vouant, ma chère, à l’éternel humus.


(*) La suite complète de mes 50 sonnets à Gabrielle est
ici




2

PETITE HISTOIRE DES PANDÉMIES

Jean de La Fontaine (d’après) :

Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Invente pour punir les crimes de la Terre,
Le Coronavirus (puisque tel est son nom)
Capable d’enrichir en un jour l’Achéron,
Fait à tous les humains depuis des mois la guerre.

Ils meurent par milliers...

La suite est authentique, et de la Pandémie
Retenons tout d’abord l’essentielle série.

Si la première offrit la couronne à Pyrrhus,
C’est qu’elle dérivait du couronapirus,
Un virus meurtrier que le basiléus
Lança sur les Troyens, nous rapporte Homerus.

La deuxième, persane, vint tuer Cyrus
Et puis Cyrus encore, et encore Cyrus,
Car en ce temps là-bas tous s’appelaient Cyrus. 
Ils se ressemblaient tant que devant deux Cyrus
On disait : «Ils paraissent comme deux Cyrus.» (*)
Et voilà donc pourquoi un survivant, Cyrus,
Plus roublard et finaud que les autres Cyrus
Sauvés également du couronacirus,
Récupéra pour lui la couronne à Cyrus.
Confondu pour toujours avec le roi Cyrus,
Tout le monde aura cru ensuite (mordicus)
Que cet olibrius était le Grand Cyrus.

(Pour écrire cela, nul besoin de gradus,
Je reste confiné, l’esprit dans les cirrus
Et même parfois dans les cumulo-nimbus.)

Née à Rawalpindi dans les eaux de l’Indus,
Une autre épidémie emporta Darius 
Plus tard ; cela se dit mais on n’en sait pas plus.

L’invasion des Gaules par César Julius
Et de la Grèce par des généraux en –us
Et du Proche-Orient par les mêmes en sus
Offrit un vaste champ aux œuvres du malus,
Et ce malgré l’effort du docteur Spartacus
Et la chlorouquina du fameux Raoustus
Et le canif caché du faux-jeton Brutus.

Les différents pestis furent des stimulus
Dont l’effet chaque jour valait mille infarctus !
Et la vérole offerte par Americus

En supplément gratuit de l’amour de Jésus
Ravagea outre-mer d’indigènes campus
Mieux que ne l’aurait fait le pire des virus.

Les massacres cathares (tout comme l’Airbus)
Rapportèrent jadis de copieux bonus
Au comte de Toulouse et au roi maximus ;
Et au pape viral, le saint Honorius.

L’empereur d’Occident que l’on disait "Magnus",
Suivi par l’Espagnol numéroté "Quintus"
Et par des rois français (tous des Ludovicus),
Napoléon surtout, staphylo aureus,
Ont tué à eux seuls plus que tous les typhus.

Benito, Francisco et Adolf en caucus,
L’œil rivé sur des plans, cartes ou prospectus,
Nostalgiques de Rome et de triumvirus,
Ont jadis présagé le corognavilrus
Sur un bloc allant de La Corogne à Vilnius
Auquel ils attachaient l’empire du Négus.
À l’appétit de l’un répondaient deux quitus ;
Ainsi se combinait en de secrets rébus
Le festin au retour duquel les sombres gus
Entasseraient des morts. Millions. Détritus.


Violant l’ordre pur d’une fleur de lotus
Belle et sereine à l’ombre des eucalyptus,
Voilà que des jardins où pensait Confucius
Surgit un monstre vil. D’abord on dit « motus ! »
Mais le mal se répand en jaunâtre mucus,
Partout. Nul professeur n’y peut faire blocus

Et quand, suivant le fil d’un mystique cursus,
L’un découvre de Jean l’étrange syllabus,
Il pense avec terreur à l’Apocalyptus !

D’ignares présidents se perdent en lapsus
Dans les méandres creux d’inutiles laïus.

Un angoissé, tout seul, se confie à Bacchus.

En ville nul vélo, nul passant pédibus ;
La grande place est vide de ses autobus.

Les cloches d’un hameau taisent leurs angélus,
Et le chœur de l’église est muet du sanctus.
Dans l’ombre cependant, venant du thésaurus,
On croit ouïr parfois, tout frêle, un orémus.

La Femme contractant son stérile utérus,
Expulse inachevé un tout dernier fœtus
.

Notre Terre n’est plus qu’un vaste tumulus
Sur lequel vient planer, éternel, un rictus.



                                                              ALP


(*) Devant deux gouttes d’eau on disait aussi : « Elles se ressemblent comme deux Cyrus ! »

TRANSITION AVEC LA SUITE

[...] Notre Terre n’est plus qu’un vaste tumulus
Sur lequel vient planer, éternel, un rictus
Mais qui — voir ci-dessous — régénère Vénus !

Oui, Vénus est ici ! C’est Irène la Rousse,
Celle que j’annonçais et qu’Esculape trousse.
Raoust, ce demi-dieu que le succès trémousse,
Prétend pouvoir guérir Irène de sa frousse.
Sûr de lui, séducteur, écoutez-le, il glousse.


3

LE CON D’IRÈNE

( Aragon, Le Con d’Irène. Voir ici )

Irène et le corona-virus

Irène et le cono-rasibus


Saynette comico-tragique ou tragico-comique,
la nuance étant laissée au gré du lecteur.
(En collaboration oulipienne avec Nicolas G. et Irène R.)

Le professeur Raoust (N.G.) :

Pour guérir à coup sûr, chère et rousse arlequine,
Viens danser avec moi sur un air des sixties,
Puis partons pédaler dans la nature exquise...
Je t’offre ce remède
(id. rock-cycle), ô rouquine !

Le docteur Rufus Diafoirus, épidémiologiste éminent, assistant du professeur Raoust :

L’authentique rousseur d’une toison, coquine,
Gage le succès de l’
hydroxychlorouquine.

La rousse Irène (I.R.) :

Savants docteurs, votre patiente en a soupé
Des stupides conseils que la Faculté donne,
Mais le vôtre est charmant et je m’y subordonne
Tant que de moi le mal n’ait été extirpé.

Dr. Rufus Diafoirus :

Irène, il faut vraiment que partout tu sois rousse.
Montre-nous ton pubis et le poil là qui pousse.

Louis Aragon (de Tarazcon) :               (*)

Trop tard ! car pour rimer à coronavirus
J’ai moi-même tondu son cono rasibus.

Le professeur  Raoust :

C’est donc pour peu de jours qu’encore on a Vénus,
Un simple alexandrin la rend à Uranus.

Dr. Rufus Diafoirus :

Privé d’Irène et de son coronasexus,
Décoiffé des lauriers de son
emeritus
Aragon n’est plus rien qu’un conard à gibus.
Qu’il s’en aille et scribouille ailleurs ses papyrus !

Le professeur  Raoust :

Une autre Irène attend ; fiévreuse, elle tousse,
Le cher virus est là. Dès demain sur la mousse
J’inventerai pour elle une bonne rouquine,
Sans hydro ni cyclo, ni sans que m’enquiquine
Celui-là d’OuLiPo qui tente vainement
Quelque pâle holorime en son confinement.

Le récitant, s’adressant à toutes les jeunes filles :

Mignonnes, du virus entendez le tocsin !
Point de masques ici, de gel ni de vaccin,
Mais d’épais rimailleurs la grotesque homélie.
N’imitez pas Irène ou la p’tite Amélie,

Vos innocentes sœurs au rasoir immolées
Qui pour trois poils de cul périrent mutilées. 
Ignorez des savants le discours politique,
Et des ministres sots la gloire pathétique.
Ces tristes charlatans dupent en kyrielle…
Cliquez ici pour voir mourir ma Gabrielle
Sous le baiser hideux du virus Corona ;
Enfin, comble d’
horreur, osez donc cliquer .

 

                                                                    ALP

(*) Aragon, Le Con d’Irène. Voir ici


Les photos ci-dessus, prémonitoires donc, ont été prises en 2017
au Musée d’Art Moderne de Luxembourg. Œuvres de Tony Cragg.
retour                                                haut de page

 

( OULIPO )

NERVAL, ACROSTICHE et ASCENSION


Le Christ aux Oliviers

    Lire ici les cinq sonnets de Gérard de Nerval intitulés "Le Christ aux Oliviers". Ils disent la prière du Christ avant sa Passion, sa Mort puis sa Résurrection. Le premier de ces sonnets comporte en acrostiche "Gérard de Nerval" comme une sorte de signature secrète enfouie au cœur même du poème. Voir l’encadré vert sur les images ci-contre et ci-dessus.

    Mais il est tout aussi intéressant d’observer la forme du poème autour de l’alignement de l’acrostiche. Si on redresse le poème verticalement, cette enveloppe représente une flèche vers le Ciel qui annonce déjà l’Ascension du Christ, ascension qui a eu lieu au mont des Oliviers précisément (sur la route de Béthanie).

    La signature découverte en acrostiche laisse donc apparaître, avec l’imagination qui convient, un message christique présageant l’Ascension. L’image se voit autant que le poème se lit.

    Dans le monde de l’OULIPO, tout aussi importante que l’acrostiche lui-même la forme laissée à un poème doit avoir un rapport avec le contenu de celui-ci.

    La dimension spirituelle de notre image et la mystique de cette flèche rendent enfin quelque peu dérisoire l’exercice littéraire proprement dit mais elles donnent tout un sens à la Contrainte.

ALP
Jeudi 20 mai 2020,
jour de la fête de l’Ascension

La ville de Jérusalem, vue du mont des Oliviers  (lithographie contemporaine de Gérard de Nerval)
retour                                                haut de page

 

(LISTE OULIPO, 2 février 2021, jour de la Chandeleur)

CRÊPES EXQUISES
"Yvons, c’est l’heure"
Chants de maquereaux bretons ordinaires

   Heure exquise
  (d'après Verlaine)

La mer reflète,
Profond miroir,
Un vol de mouette
Dans le ciel noir
Quand le vent pleure...
Rêvons, c’est l’heure.

                                  (Fanny Bonenfant)

Crêpe exquise (1)

La gigolette
Mary-Soizig
Tourne galette
Sur son bilig
Et fait ton beurre,
Yvon. C’est l’heure.

Crêpe exquise (2)

Plein sa cassette,
Vaillante, Elig
T’offre en recette
Sur son bilig
L’argent du beurre.
Yvon, c ’est l’heure.

Crêpe exquise (3)

Sur son bilig
C’est pour le trèpe
Que Mannaïg
Saute sa crêpe.
C’est pas un leurre,
Yvon, c’est l’heure !

Crêpe exquise (4)

Quand il fait noir
Yvon et Glenn
Partent le soir
Prendre chez Gwen
Leur part du beurre.
Ils vont, c’est l’heure.

Crêpe exquise (5)

On dit qu’Yvig
À Kerlena
Forge un bilig
Pour Tryphina
Qui paie en beurre.
Yvon, c’est l’heure.

Crêpe exquise (6)

Sur le bilig,
Sous la galette
De son Lanig,
La Pomponette
Glisse du beurre.
Il fond, c’est l’heure.

Crêpe exquise (7)

Le gars Saïg
À la baratte,
Pour Anaïg
Tournant la pâte,
Bat le bon beurre.
Ils font, c’est l’heure.

Crêpe exquise (8)

Le cidre amer
À la bolée
Livre à la mer
La noire idée
Qu’Alis effleure.
Buvons, c’est l’heure.
 

La recette complète offerte par ces crêpières avec les rimes de Verlaine :

Crêpes exquises

Pour la galette
Faite au blé noir
Il faut du lette
Tout frais du soir,
Des œufs, du beurre…
Yvons, c’est l’heure.

Lexique :

bilig : galettière en breton
trèpe : foule admirative (argot)
lette : mot paysan désignant le lait (au Québec, chez Maupassant, etc.)

Soizig, Elig, Mannaïg, Anaïg, Gwen, Alis, Tryphina : prénoms féminins bretons


Glenn, Lanig, Yvig (Yves, Yvon), Saïg : prénoms masculins bretons

retour                                                haut de page

 

(OULIPO)

ADIEU FUNÈBRE

(billet à une amante qui m'a quitté)



Chère amante, ces vers désignent mon tombeau
Hélas ! Je ne vois plus dans tes yeux mon flambeau.
Une corde m'attend, fixée au rocambeau,
Et je n’espère plus, au pied de l’escabeau,
Que ton épiphanie et son éclat de beau
Épargnent à mon ciel l’envol noir d’un corbeau.
Alors trouve d’un cœur ici quelque lambeau
Et sache t’en repaître, ô carnassier barbeau !         (*)


(*) Intégralité des huit rimes en -beau (noms communs)
    Voir ici le contexte oulipien de ce huitain.

retour                                                haut de page

 

Algues bretonnes et calligraphie chinoise



      La première photographie ci-dessus montre deux fragments d’algue sèche et cassante, de couleur brun foncé ou noire, plantés dans le sable d’un estran soumis à une forte lumière du soleil (la plage de Kerfissien, Finistère). Les ombres sur le sable y sont aussi visibles et importantes que les débris d’algues eux-mêmes. (Note : Les deux fragments de droite sur la photographie n°1 n’en sont probablement qu’un seul partiellement recouvert par le sable.)

      En rejoignant par des lignes les points extrêmes des algues à leur ombre, et en traçant certaines tangentes communes à leurs courbures, on obtient un faisceau de droites, de « rayons solaires » donc, toutes parallèles évidemment puisque la distance au soleil est  infinie. On a tracé également certains rayons à partir de points particuliers comme les points de pénétration des algues dans le sable. (1)

      En rouge sur la photographie, le faisceau de rayons a été prolongé dans tout le rectangle de l’image. Le contraste a été accentué artificiellement pour que l’algue et son ombre ne forment plus qu’un objet noir unique. Sur une image explicative (deuxième photo ci-dessus), pour mieux comprendre l’enchevêtrement des algues et des ombres, on a exagérément éclairci et saturé les couleurs pour tout différencier ; ainsi les ombres apparaissent bleues.

     Finalement l’image noire étonnante, rappelle les calligra­phies chinoise ou japonaise ; le faisceau de droites rouges qu’on lui superpose ajoute un ésotérisme surréaliste, comme le font certains artifices sur des œuvres dadaïstes. On peut aussi voir là des signes  musicaux étranges sur des portées tout aussi étranges.

      Le peintre Jean Degottex, dans les années 1950-1960, séjournant à Portsall (Finistère) en compagnie du critique d’art Charles Estienne, avait trouvé une semblable inspiration dans les algues éparses laissées par la marée descendante sur les plages de Tréompan et Lampaul-Ploudalmézeau, ces plages immenses où j’ai moi-même, depuis mon enfance, si souvent traîné mon imagination. Degottex avait fait aussi le rapprochement avec la calligraphie chinoise. (2) 

      Cette image, ainsi que d’autres présentées ci-après, suscitent quelques remarques. Les lignes rouges, comme celles qui guident les écritures scolaires, sont révélées par les signes de cette calli­gra­phie mysté­rieuse issue du rêve, du soleil, des tempêtes et des marées. Ces signes sont-ils les lettres encore inusitées d’une « littérature potentielle » ? L’ordre linéaire du faisceau de parallèles désigne-t-il un sens mental dans le désordre d’une d’algue tordue emmêlée dans son ombre ? La liberté du dessin — ou celle de son interprétation —  s’affranchit-elle de la contrainte dudit faisceau qui enferme autant qu’il supporte ? Par extension, la contrainte en poésie nuit-elle à la liberté de celle-ci ? Ou bien est-elle le principe même de cette liberté ? Et l’OuliPo dans tout ça ? Hé ! Vieux débat !

      Tout autant que les algues, l’important dans ces images serait donc les droites rouges mathématiquement et peu innocemment dessinées. On se plaît à penser que si l’ordre originel devient désordre dans une dégradation irréversible (entropique) de l’univers, il conserve néanmoins la signature ordonnée d’un (du) Créateur, signature découverte et visible ici, mais surtout imaginée et suggérée dans un sens inaccessible à notre intelligence limitée. Un galet extraordinaire ramassé par hasard dans le Sillon de Talbert (Côtes-d’Armor) m’avait inspiré jadis une réflexion identique. (3)

.

ALP, août 2021


(1) Sous r éserve que l’épaisseur de l’algue n’altère pas la visibilité de tous ces points. Cette discussion nous amènerait aux exigences de cette bonne vieille géométrie descriptive.

(2) Jean Degottex :

Jean Degottex à Portsall
(à comparer avec la grande photographie ci-dessous)

(3) Voir ici le galet du Sillon de Talbert.


retour                                                haut de page

 

Amants exquis



      Un jeu littéraire, dont j'ai composé jadis les règles et dont je rapporte ci-dessous ma participation retrouvée, consistait à

  1. Réunir une banque de mots (ici 48 issus du vocabulaire scientifique et 12 autres issus d’un vocabulaire plus commun).
  2. Grouper par paires les mots pris au hasard.
  3. Ecrire un texte, une ligne par paire (ici donc 30 lignes), dans un ordre quelconque, sans contrainte de longueur. Le titre du texte final était imposé « Amants exquis », en hommage bien sûr aux surréalistes mais sans réel rapport avec leurs fameux « cadavres ».

     Nous étions trois joueurs. Tour à tour chacun a choisi à son gré un mot scientifique ou (pseudo-scientifique) en ayant connaissance des mots précédemment choisis par tous. Après les 48 premiers mots (16 par joueur), on a fait de même avec les 12 autres, 4 par joueur. Les mots scientifiques étaient supposés apporter une connotation mystérieuse (voire ésotérique) et les mots plus communs avaient pour rôle d’adoucir la contrainte pour améliorer au final l’éventuelle beauté littéraire et conventionnelle du poème résultant. Dans ce but encore, liberté était laissée à chacun de remplacer n’importe quel mot par un autre de même racine ; par exemple, on pouvait remplacer cosmos par cosmique, glissement par glissant, fréquence par fréquences, hyperbole par hyperbolique, etc. Dans le cadres de l'OuLiPo un tel exercice s'appelle un logo-rallye.

      Chacun a composé sa rédaction en prenant le temps qu’il voulait en heures, jours ou semaines. Quelques lignes facultatives de conclusion, sans aucune contrainte, peut-être pour mieux justifier un titre occulté par l’hermétisme, étaient autorisées pour clore cet exercice de littérature potentielle.    

      Mon but aujourd’hui, en exhumant mon texte ancien, était de le réécrire en vers rigoureux, genre La Jeune Parque ou Le Cimetière marin. Hélas !

Voir ici la liste des mots choisis et leur réunion par paires.

AMANTS EXQUIS

Notre accélération sans limite
dans des labyrinthes désordonnés
laissait derrière nous un sillage de tourbillons inversés
(et aussi d’autres spirales voluptueusement divergentes)
cependant que des alcools et venins cosmiques,
d’abord évaporés de quelque océan stagnant dans le chaos,
se condensaient dans un univers virtuel
où naviguaient en translation  
(à nos côtés ainsi que des fantômes flottants)
des hélices en vaine quête de leur rotation propre.

La convergence spontanée de nos spectres
enfermés et vibrant dans les symétries d’un régime glissant
animait ceux-ci de fréquences improbables
tout en les faisant résonner (selon les lois
d’une physique savante mais inconnue)
dans des gouffres abyssaux où des fenêtres béantes
s’ouvraient sur des volumes extérieurs indéterminés.

L’élasticité d’hypothèses hermétiques ou dégénérées
prolongeait en lentes caresses toutes ces harmonies ;
elles s’égrenaient selon un cycle fictif,
ou bien mouraient sur des lignes hyperboliques,
ou bien, au contraire, se répétaient en fractales
dans l’infini d’un ciel.

Dans un espace où l’entropie décroît
— c’est la remontée d’un temps niant sa définition
l’ordre éclaté de nos mouvements
et les morsures de nos phases enlacées
s’additionnaient en une musique dont s’emparait alors,
à la lueur intégrale de lumières obliques, la lyre
d’un ange sublime qui, peut-être, passait là par hasard.

Tant de râles dans ta bouche,
de noir sur ta paupière,
de roulements sous ton sein… !


Robert Hauchecorne, 1950 (André Breton possédait un tableau de ce peintre)

retour                                                haut de page

 


PARFUMS EXQUIS



retour                                                haut de page

 


CHARADES  BRETONNES


Île de Sein - Départ de la vedette

 

 

première charade

 

seconde charade

1

Mon premier n’est pas plat

1

Mon premier est plat

2-a

Mon deuxième est un mot enfantin

2-a

Mon deuxième est un mot enfantin

2-b

Mon deuxième peut aussi être la
négation du second deuxième
de la charade suivante.

2-b

Mon deuxième peut aussi être la
négation du second deuxième
de la charade précédente.

3

C’est la présence de mon troisième
qui permet à mon premier
de ne pas être plat.

3

C’est l’absence de mon troisième
qui permet à mon premier
d’être plat.

Mon tout se dit quelque part quand on part

1

kén parce que kénavo
(kén a vaux)

1

kén ou parce que kénavo
(kén n’a vaux) ou (ké n’a vaux)

2-a

na (kén-na)

2-a

na
(kén-na ou ké-na)

2-b

n’a ou a 
(kén-na ou kén-a)
         

2-b

  a ou n’a
  (kén-a ou kén-na ou ké-na)

3

vaux parce que kénavo
(kén a vaux)

3

vaux parce que kénavo
(ké n’a vaux) ou (kén n’a vaux)

Mon tout : kenavo (au revoir en Bretagne ; prononcer kénavo)

 

retour                                                haut de page


La France, mère des arts au pied du mur
(ou de la nécessité objective du grand ravalement)

photo prise en Allemagne le 5 octobre 2022)
dans un village de la vallée de la Nahe (Gemünden, Rhénanie-Palatinat)

retour                                                haut de page


Pangrammes du juge blond qui fume


       Le pangramme est un texte très court, au mieux une seule phrase, contenant au moins une fois toutes les lettres de l’alphabet. Outre la contrainte de définition (toutes les lettres), les qualités d’un pangramme sont sa brièveté, son intelligibilité, la non répétition des consonnes, ses qualités poétiques, l’absence de noms propres qui seraient les fourre-tout de consonnes difficiles, etc. La recherche d’un optimum de qualité impliquant tous ces critères font du pangramme un exercice très pratiqué par les amateurs de mots.

       Le pangramme du juge blond qui fume, trouvé en 1921 par un certain Charles Triouleyre à l’occasion d'un concours de dactylographie, magnifique alexandrin malgré son hiatus à l’hémistiche, est le chef-d’œuvre du genre, inégalé et probablement inégalable, un parfait compromis entre les contraintes de technique et de lisibilité. Voir ci-dessous ce pangramme (36 lettres), ainsi qu’un autre (bien modeste, 58 lettres) que j’ai écrit en réponse à celui-là, et enfin une analyse caricaturale de ce dialogue singulier.


le patron  :     
Portez ce vieux whisky
au juge blond qui fume.
le garçon de salle  :
Ce gonze roule un joint
qu’il part fumer aux WC.
Le bon whisky va attendre.

Analyse de texte

      Dans la clientèle du bar où l’on aura entendu ce dialogue singulier, le patron nous désigne clairement trois sortes de consommateurs : des juges, des clients qui ont les cheveux blonds, des clients qui fument. Le destinataire du vieux whisky se situe à l’intersection de ces trois catégories. Le fait qu’il soit désigné comme le seul « juge blond qui fume » laisse penser qu’il y a au moins un autre client qui n’est pas juge, au moins un juge qui n’est pas blond, et au moins un juge blond qui ne fume pas. Les blonds et les fumeurs sont facilement observables ; et puisque le garçon de salle doit porter à bonne destination le précieux whisky, il doit forcément déceler aussi, parmi tous les clients, lesquels sont des juges. On devine donc que ceux-ci portent les vêtements et les insignes distinctifs de leur fonction (hormis bien sûr le chapeau qui cacherait leur blondeur possible). En admettant que toutes les caractéristiques distinctives données par le patron sont nécessaires et suffisantes pour mener le garçon à bon port, on peut démontrer facilement que le nombre total de juges est supérieur ou égal à trois, voir le schéma ci dessus.

       Au vu d’un tel nombre de magistrats en grande tenue, il est logique de conclure que l’on n’est pas ici dans un troquet de faubourg, mais très certainement à la buvette d’un tribunal, là où tous les juges, avocats et autres personnels de justice viennent bavarder et prendre un petit remontant entre deux audiences. La haute qualité sociale de notre magistrat est parfaitement associée ici à sa connaissance raffinée des grands whiskies ; et sa hiérarchie professionnelle supérieure nous est prouvée par les égards que le patron bistrotier lui accorde.

       Mais, mais... mais le garçon de salle connaît bien tout ce monde-là et sa réponse nous interpelle ; il sait que l’alcool n’est pas le seul stimulant de notre juge et qu’un bon pétard fumé en cachette, trivialement aux WC, vient compléter son repos. Eh oui ! On savait déjà, grâce à une rare presse d’information (plutôt que d’éducation ou de tranquillisation), que les députés de notre Assemblée Nationale se plaisent à apaiser fumeusement leurs émotions souvent déjà fumeuses ; on sait désormais, grâce à la franchise d’un simple serveur de buvette, que c’est également le cas de certains dignitaires de la magistrature, ceux-là mêmes qui dénoncent parfois chez les autres leur propre et éventuelle addiction. 

      Bah !
retour                                                haut de page


Pangrammes de Werther

       Le pangramme est un texte très court, au mieux une seule phrase, contenant au moins une fois toutes les lettres de l’alphabet. Outre la contrainte de définition (toutes les lettres), les qualités d’un pangramme sont sa brièveté, son intelligibilité, la non répétition des consonnes, ses qualités poétiques, l’absence de noms propres qui seraient les fourre-tout de consonnes difficiles, etc. La recherche d’un optimum de qualité impliquant tous ces critères font du pangramme un exercice très pratiqué par les amateurs de mots.

Le premier pangramme (58 lettres) est constitué de deux décasyllabes .
Le deuxième pangramme (66-lettres) est constitué de trois octosyllabes.


demande  : 
Sauvez Werther, ce fol et jeune preux
enkysté dans sa bogue romantique !
réponse  :
Goethe, Massenet, le whisky !
Pas plus qu’eux je ne sauverai
ce beau zazou de sa folie.
retour                                                haut de page


page suivante